Sur son site internet il dit de lui-même qu'il a écrit dix romans (un chiffre honnête), traduits dans 41 langues (bonne équipe commerciale chez son éditeur) et publiés à plus de 20 millions d'exemplaires, toutes éditions et toutes langues confondues (là, c'est de la triche, car pour chaque roman publié en français en France, combien de tirage ? Mystère.) Ce qui fait, conclut-il, qu'il est "l'auteur français le plus lu dans le monde". Et de citer les auteurs, connus sur la place, du sondage qui lui permet cette affirmation que, vraie ou non, j'estime biaisée.
Je n'ai jamais lu aucun de ses livres, je ne me lancerai donc pas dans une critique ou un commentaire, il n'en manque pas dans les magazines. Vous les trouverez aisément sur Wikipédia, dès l'instant où vous aurez percé l'anonymat que j'impose à ce "grand écrivain". Non, si j'en parle aujourd'hui, c'est que j'ai lu l'article qu'il a publié dans le supplément d'un grand journal. Il s'agissait d'une critique de livre. Honnêtement, je suis tombée de mon arbre.
Je ne dirai rien du fond, des idées qui y sont exprimées (enfin, de l'idée unique qui nous est distillée sur trois longues colonnes sous la forme "thème et variations"), de la banalité des arguments et de l'absence totale de raisonnement pour ne m'attacher qu'à la forme. Lorsque j'ai un stagiaire, je l'emmène non pas à la chasse au Dahu, mais à celle au "Quiquedon". Dans le texte de ce grand écrivain, il n'y a pas une seule phrase qui n'en contienne deux, trois ou quatre ! Avec des tournures légère du genre : "[...] de l'ignorance de ceux qui nous gouvernent et qui n'ont rien appris de l'histoire des peuples qu'ils prétendent diriger vers un futur meilleur que les hier". Ouf. Et dès que l'on sort de cette mélasse, c'est pour tomber de Charybde en Sylla avec des images cuites et recuites, les "tristes âmes errantes dans les palais de la république" ou la femme "sauvageonne et magnifique dans sa détresse". Re-ouf. Je passe enfin sur les répétitions, les maladresses de style et autres approximations syntaxiques. Au Certificat d'études ou en fin de CM2, je donnerais 2/20 à l'auteur : 1 point pour avoir compris le sujet, 1 point pour avoir rempli le nombre de lignes requis.
Je trouve absurde qu'il y ait eu 20 millions de personnes à s'être fait piéger par ce grand écrivain. Tablons sur la qualité de ses traducteurs, qui ont peut-être occulté l'indigence de l'écriture en français. Je plains l'éditeur du supplément dans lequel j'ai trouvé cet article, il doit se mordre les doigts d'avoir fait un si mauvais choix. Je suis désolée pour l'auteur du livre évalué par le grand écrivain et qui pourrait souffrir de la dithyrambe inepte dont il fait l'objet.
"Nous sommes drôlement seuls au milieu des autres", écrit-il. Ah oui, tu l'as dit !
À propos de stellamaris
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