D’ailleurs, ces femmes-là – eh oui, il en existe quelques-unes, avouons-le – n’ont jamais la migraine, au mieux un très léger mal de tête qui ne les empêche nullement de cancaner au téléphone avec leurs copines au lieu d’aller cajoler leurs mâles en mal de rut.
Car la Migraine, la Vraie, lorsqu’elle survient, fait amèrement regretter à sa victime une bonne partie de jambes en l’air !
A l’inverse de l’amoureux qui pose un délicat baiser dans le cou, la Migraine aime à commencer les préliminaires par quelques coups sourds tapés derrière les tempes lesquels, au lieu de provoquer les chatouillements espérés, font froncer les sourcils dans l’attente angoissée d’un enhardissement probable.
Devant cette passivité trompeuse, elle ose des approches plus directes, s’insinuant dans le nerf optique, poussant plus loin son emprise sur le corps tout entier, provoquant des frissons dont le plaisir est exclu.
Pourtant, l’assiégée se rebiffe, refusant de la laisser mener la danse en solo.
Elle s’éveille doucement aux signaux que son corps lui envoie et décide de prendre part à la partie qui s’engage. Répondant aux avances de plus en plus hardies de la Migraine, elle avale une double dose d’aspirine, dans l’espoir fou de reprendre les commandes, histoire d’inverser un peu les rôles…
La vicieuse déploie alors toute son ingéniosité à explorer des recoins encore vierges, éveillant de nouveaux troubles jusque là inimaginables. Adepte de parties à trois, elle invite la lumière à venir jeter son éclat sur sa victime déjà haletante dont les paupières closes fuient ces affolants débordements.
Allongée, impuissante face aux assauts sans pitié de son Amante haïe qui la martèle sans relâche de ses coups cadencés, elle rend enfin les armes, épuisée, vidée, s’abandonnant, à son corps défendant, au bon vouloir de son assaillante.
Plus tard, bien plus tard, celle qu’on nomme aussi Céphalgie se retire, repue de tant de douleurs infligées, satisfaite de compter à son harem une migraineuse de plus…
A tout prendre, la migraineuse échangerait bien cet amour à sens unique contre les caresses parfois envahissantes de son soupirant attitré…