La nouvelle expression incroyable dont nous assomme notre ministre de la santé à l'occasion de la mise en application de la loi anti-tabac est "lieu de convivialité". Elle le répète autant que faire se peut, si possible, dans chacune de ses phrases.
Georges Orwell l'avait bien compris dans 1984 : Chaque entorse à la liberté doit s'accompagner d'une communication adéquate qui permet à la population de bien digérer toute nouvelle limitation de son espace vital. Quoi de plus sympathique qu'un "big brother" qui veille sur nous?
Et demain quoi? Interdication de servir des boissons alcoolisées dans les bars après 21h, afin de lutter contre l'alcoolisme? Fermeture obligatoire des "lieux de convivialité" après 22h dans le cadre de la lutte anti-bruit? Couvre feu après 23h, afin de pouvoir se lever mieux pour travailler ou consommer plus? Triplement des caméras de surveillance dans les rues comme au Royaume-Uni, afin de lutter contre la délinquance? incitation à la "délation civique" comme chez les Suisses?
1984, c'est maintenant. Nos enfants le considéreront probablement comme un roman social à la Zola, plutôt que comme de la science fiction. Nous atteindrons bientôt le niveau des iraniens qui ne peuvent se retrouver et festoyer que dans le cadre de soirées clandestines. En Sarkoland aussi et dans le Paris que Delanoé est parvenu à transformer en ville musée, il n'est plus question de faire la moindre soirée même calme, sans voir rapidement débarquer une horde de flics zélés et aggressifs dès que le niveau sonore dépasse celui de la propagande diffusée à la TV.
Grâce au progrès de notre société, nous pouvons être désomais tout à fait rassurés: nous mourrons tous en parfaite sécurité et en excellente santé.