La première momie que nous dépouillâmes de ses bandelettes fut celle du sarcophage. Elle portait un magnifique masque funéraire datant probablement du Nouvel Empire. Son enveloppe par malheur avait souffert des affres du temps. Considérablement noircie, elle avait été fragilisée par l'apparition d'une couche gluante qui s'était répandue sur toute la surface du corps. Je soulevai avec précaution le masque de bois feuilleté d'or, mais il adhérait au front. Je dus inciser au scalpel autour de la pièce en prenant garde de ne pas endommager les chairs. Le masque décollé, Henri lâcha les pieds de la momie pour le prendre délicatement et le déposer sur le bureau. Sous le masque, l'étoffe arborait une teinte plus claire et sa texture paraissait moins rigide. Sur le reste du corps, le textile durci semblait extrêmement fragile.
Au scalpel, j'entamai la calotte crânienne par l'arrière en découpant les bandelettes les unes après les autres, tirant chacune d'elle jusqu'à ce qu'elle se brisât ou partît en poussière. Je découvris deux amulettes, une plume d'autruche Shou
en faïence rouge et un pilier djed beige
en terre cuite vernissée. Une demi-heure plus tard, je tranchai le dernier suaire. J'en délimitai le contour, le soulevai non sans quelque appréhension, et la tête entière apparut enfin. Quel moment d'émotion ! Et quelle frayeur quand je croisai les orbites vides ! Sur le visage émacié, aux pommettes saillantes et à la peau aussi fine que desséchée, flottait une expression terrifiante. Quelle abominable agonie la malheureuse créature avait-elle connue pour que ses traits fussent à ce point déformés par la souffrance ?