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L’étoile manquante (fin de Joli Coeur)

Publié le 04 novembre 2010 par Ctrltab

L’étoile manquante (fin de Joli Coeur)

- Tu sais, le vieil homme se prépare à mourir. Il se débarrasse de ses gardes du corps, toi, son protecteur physique, et moi, la gardienne de ses désirs, sa maîtresse. Il nous chasse, nous met dans le même sac et dit au revoir aux vies secrètes qui l’entourent. « Ouste mes ombres dehors ! », semble-t-il dire. Et il les marie ensemble parce qu’il est sentimental… et possessif.

Je me laisse consoler par la belle voix d’Emma, ma nouvelle femme que je connais à peine. Je l’ai épousé il y a deux jours et je me suis fait virer. Qui sait ? Peut-être serons-nous heureux ensemble ? Les mariages arrangés ne sont-ils pas les plus pérennes ? Et puis, nous avons en commun un amour non partagé et un maître perdu. Sans oublier que nous sommes riches désormais : comme promis, André nous a fait une dotation conséquente.

Il est mort trois mois plus tard. Dans un stupide accident de voiture, l’engin complètement fracassé par un sanglier du roi et André encastré le cœur ouvert dans l’animal. A mon avis, ce sont les Dieux qui, de guerre lasse, ont dû concéder à ses prières, le laisser enfin partir… Toutes ses tentatives de suicide avaient dû échouer, cet homme avait trop la baraka pour décider de sa propre vie.

Je ne suis pas allé à son enterrement. Il y a certaines personnes que vous avez aimées que vous ne pourrez jamais vous résoudre à mettre sous terre, surtout celles qui vous ont remis les pieds sur terre, comme mon ancien boss. Et puis, je ressens toujours sa mort comme un échec personnel, comme si j’avais failli à ma mission première : celle de l’empêcher de mourir.

Je me suis donné pour lui et il m’a offert en échange la liberté et une femme que je finirais peut-être à aimer.  Je ne suis plus ni casse-cou, ni parano, ni alcoolique, ni jaloux. Je sais désormais ce qui me manque. Et quand je vais poser mon stylo, je  finirai cette histoire, mon histoire, et je pourrais, enfin, commencer à vivre ma vie. Ma femme m’appelle…

- Tu descends, Simon? Je t’attends,  joli coeur, le dîner est prêt…


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