La polémique qui déchire la blogosphère gauche en ce moment, c'est : "faut-il, ou pas, que Juan publie systématiquement des photos de Carla Bruni toute nue, ou au moins les seins à l'air?" Juan n'est pas le seul à instrumentaliser le passé de notre Première Maîtresse à des fins politiques : Nicolas avait fait assez fort aussi.
C'est Wildo qui balance un pavé dans la mare dans un commentaire chez Sarkofrance:
Sinon, une remarque qui n'engage que moi, c'est obligé d'avoir Carla Bruni toujours nue en vignette ?
Juan répond:
je comprends ta remarque - ça fait un peu macho pervers d'afficher Bruni à poil dans nombre de billets. En fait, j'ai hésité. Puis je me suis tenu le raisonnement suivant : (1) l'affichage médiatique de cette liaison est vulgaire; (2) soyons aussi vulgaire que lui. je cherche des photos de Sarkozy nu mais c'est plus difficile à trouver...
Ne t'inquiète pas, je vais bientôt arrêter faute de photos.
Est-ce un cas de machisme pervers collectif, ou bien y a-t-il la possibilité que la surexposition de la vulgarité présidentielle puisse, à la longue, nuire à notre Très Grand Homme (TGH)? Les récents sondages (Libé via Juan) indiquent que la France globalement désapprouve ce comportement (63%), et même les experts en comm', normalement pleins d'admiration pour le génie communicationnel du TGH, préviennent:
si son crédit politique s'atténuait», ju ge Miquet-Marty. «Si les impatiences sociales devenaient plus fortes, la mise en scène de sa vie privée, et le contraste avec le quotidien des Français, pourraient lui être préjudiciables.»
Surexposer Carla Bruni (y compris ses parties féminines) serait donc une manière de nuire, plus efficace que tout ce que peut faire une entité comme un parti politique d'opposition?
Il y a quelques jours, Mathieu Lindon, apparamment journaliste et très certainement imbécile, a publié une chronique inepte chez Libération sous la rubrique Vox populi dont la thèse est, en somme, que... enfin, je n'arrive pas à le résumer, j'en laisse le soin à l'auteur:
La diabolisation un peu loupée de Nicolas Sarkozy a pour effet une dédiabolisation endiablée. Avant la présidentielle, on prétendait que son élection provoquerait quelque chose comme la suspension des libertés individuelles et le pays à feu et à sang, et maintenant on lui reproche de se montrer avec sa nouvelle copine dans un parc d'attractions ou d'emmener un humoriste pas assez raffiné à notre goût visiter le Vatican. Si on n'avait trouvé que ça contre Hitler, on s'en souviendrait moins aujourd'hui.
Vous avez bien compris : la pire chose qu'on puisse reprocher à Sarkozy, c'est sa liaison avec Carla B. Avant l'élection, les anti-sarkozystes primaires prévoyaient des choses horribles, et maintenant, comble de ridicule, ils ne trouvent rien de mieux à lui reprocher que le fait de se faire photographier avec sa copine. Je ne crois pas que Mathieu Lindon lise régulièrement Sarkofrance; il a dû s'endormir pendant que la législature approuvaient les tests génétiques pour les étrangers; il doit éteindre sa radio quand on commence à parler des expulsions sauvages des clandestins; il n'a pas dû comprendre tout à fait la signification du paquet fiscal; la suppression de la durée légale du travail ne lui fait pas peur; pour lui, Kadhafi a vraiment changé depuis qu'il a libéré les infirmières bulgaures qu'il emprisonnait et faisait torturer. Non, Mathieu Lindon s'est endormi le 6 mai et a rouvert les yeux quand Sarkozy et son amante embarquaient pour Louxor.
Alors, comment est-ce possible de mettre en balance Carla Bruni et le reste de la politique de Sarkozy, l'infiniment léger et le terriblement lourd? Faut-il engueuler les Français parce qu'ils réagissent à Carla là où ils laissent passer tant d'autres choses tellement plus importantes?
J'écrivais, dans les jours qui ont précédé l'annonce de l'hyperdivorce :
Mais dans l'hypothèse d'un divorce, il est clair que beaucoup de l'avenir politique de Sarkozy se jouera sur les pages des revues de Prisma Presse, surtout Gala et VSD.
J'aurais dû ajouter Voici, je l'avoue. Mais pour le reste je n'étais pas si loin de la vérité, même si je pensais que Sarkozy allait passer beaucoup plus de temps à nous expliquer son divorce. Il a trouvé plus juste de sauter cette étape, et... (j'arrête).
Tout cela pour dire que la vie politique marche davantage par des symboles, des images, des perceptions de la personnalité intime de nos hommes et femmes politiques, que par les chiffres, mêmes truqués, du chômage. S'il fallait, pour établir une sorte de contre-pouvoir médiatique, que nous autres blogueurs passent le reste du mandat de Sarkozy à discuter de la marque des petites culottes de Carla Bruni, eh bien, je serais partant, même si le sujet est, malgré tout, extrêmemnt lassant, surtout au bout d'une année ou deux.
Le mélange des plans personnel et politique est désormais un fait de la vie politique. Il faudra faire avec. C'est désolant, mais il y a de l'espoir lorsqu'on constate que la pipolisation est à double tranchant, et qu'elle peut devenir une arme de communication contre celui qui était censé si bien la maîtriser.