Je n’ai pas vu le film hier soir, on a dîné et on s’est embarqué dans une discussion où Samuel a tombé le masque. Il ne vient plus en Tunisie parce qu’il a rompu avec une femme, qu’on n’a jamais vu et c’est uniquement pour elle qu’il venait. Après 10 ans de relation, elle a finit par avouer qu’elle ne pouvait pas l’épouser et a finit par se marier avec un tunisien, 2 mois après leur rupture.
Il m’avoue que même s’il revient en Tunisie, il ne prévient personne et fait une sorte de pèlerinage de cette histoire. Et lorsqu’il me dit « Et toi chérie, ce lourd fardeau que tu portes, c’est un homme ? » Je ne dis rien.
Il avait l’air si triste et si vulnérable démasqué, je me sentais plus forte et plus solide que lui, j’avais envie de le prendre dans mes bras, lui caresser les cheveux... sans arrière pensée, comme il l’a fait ces jours passés Je lui dis que je veux qu’il me parle encore et il continue. Il ne me contredit pas, même dans la tristesse et la sincérité, sa classe et son élégance autant dans son langage que dans sa gestuelle restent de rigueur. Il est beau, et il est malheureux. Il a dit qu’après elle, la vie n’a plus de sens, les amis sont des épouvantails, l’argent lui brûlent les doigts, mais il arrive en masse, puisqu’il bosse comme un dingue pour ne penser à rien, sa voiture est un cercueil monté sur roues, et son allure n’est qu’un masque. Je n’ai pas ouvert la bouche, et il paraît comme sur le divan d’un psy mais en plongeant son regard dans le mien. Il était sincère, depuis le temps j’arrivais à déceler le mensonge. Et là ça n’en n’était pas un.
La sincérité d’un homme blessé, la fragilité d’un enfant,. Samuel qui parle d’amour, de rupture .C’est un paradoxe total. Ce n’est pas l’image de Don Juan que je me faisais de lui quand petite fille, je l’idéalisais. Il est beau... Il est triste... Je le prends dans mes bras... je n’ai pas envie de le lâcher. Il me le rend bien. Il fait nuit... Il y a un vent frais. Mais je ne l’ai senti que quand j’ai retrouvé la sensation de chaud entre ses bras ;
C’est les vibrations de mon vibreur qui m’ont fait prendre conscience de la pente glissante que peut être j’étais en train d’emprunter. C’est D. complètement émoustillée, déboussolée,... je ne sais pas quoi faire je ne décroche pas et je rougis, je sens mes joues s’échauffer.
J’attends une réplique de la part de Samuel, mais il ne dit rien. Il est calme, mais je mettrais la main au feu qu’il est aussi en panique que moi.
On reste encore là un petit quart d’heure, et il finit par me proposer avec la plus grande politesse du monde : « Tu as quelque chose à faire, je te raccompagne ?! »
Je n’avais pas envie de le quitter. « Non, je n’ai rien à faire » Pas un mot de plus.
« Tu veux manger un bout ? »
Je ne réponds pas et je finis par dire « si tu veux »
« On va marcher un peu, ma chérie, s’il y a un truc qui te plait, on s’arrête ?! T’as qu’à me dire »
Je n’avais pas l’habitude d’être aussi chouchoutée, ni chez moi, ni par mes petits copains, ni par personne. Je découvre une douce assistance, délicieuse... quoiqu’il veuille, pourvu que ça ne s’arrête jamais. Je fermais les yeux et le laissais me trainer par la main pendant que l’air frais me revigorait en me fouettant le visage. Je souriais... du fond du cœur.
Mon téléphone n’arrêtait pas de vibrer, appels et sms... au moins 3 ou 4 fois. Je n’ai même pas regardé. On s’est arrêtés pour manger dans un petit bistrot. J’ai regardé mon tel, 3 appels de chez D. et 2 sms :
Le premier disait : « ça y est j’ai un pied dans Paris, et je veux qu’on se fasse un revival ! » et le second venait de mon frère : « Papa arrive à mieux parler, et son contrôle est bon... essaie de prendre du bon temps. J’en ferais de même quand tu reviendras, pour le moment je gère. »
Confusion totale :
Mon frère et moi, n’avons jamais été aussi proches, et aussi proches de notre père...Mais si mon frère savait que je me ballade main dans la main avec un ami de Papa qui me considère peut être comme un fantasme et voudrait juste un plan cul avec lequel il enterrerait tous ses souvenirs tunisiens ?! Je ne suis pas contre l’idée, par ailleurs, j’ai assez manipulé d’hommes mûrs. Pourquoi pour une fois, que je ne suis pas insensible à un ‘vieux’ ce n’est pas moi qui assouvirait un fantasme de gamine ?!
Putain, mon frère serait peut être choqué, mais je ne serais pas la première de la famille, mon jeune frère s’est tapé une amie de ma mère pendant six mois ! Il l’avait rencontrée au cours de chant qu’organise Maman à la maison, avec ses amies. Notre atout dans la famille c’est la discrétion. Mon petit frère me confie tout, donc moi je le savais, et ça me faisait rire. Dans ma famille, on essaie tous les trois de protéger la petite, pour le reste mon grand frère, joue au grand frère. Quant à ma mère, ne comprenant rien au petit jeu, pensait crâner avec son fils beau comme un Apollon, jeune et vigoureux, sans penser que le concept de Cougar existe. Ce n’était qu’une parenthèse.
Et D. dans tout ça ?
Je n’ai même pas eu le temps de me poser la question, mais la réponse s’annonce catégorique. Pas de revival, j’ai fait le tour de la question. Se voir peut être... J’aviserais au feeling.
Je réalise que ça fait une bonne demi heure qu’on parle, que Samuel me traîne alors qu’il est au téléphone alors que je suis perdue dans mes pensées. On arrive devant chez lui.
Je regarde la porte, il parle encore, il me traîne vers l’ascendeur et attends de finir sa conversation téléphonique pour monter. Je profite de ces quelques secondes pour réfléchir. Je n’ai pas envie que ça foire, c’est purement égoïste mais je suis sur mon nuage, et je ne sais pas ce que j’attends de lui, plus que ce bien être qu’il me procure, je n’arrive pas à statuer et à choisir entre l’envie de passer une nuit avec lui... de rentrer à Tunis dans 72h et reprendre une vie normale, en clôturant un Nième dossier parisien. Mais le dernier, D., est encore dans les parages et a réussit à me faire souffrir.
D’un autre côté c’est une connaissance, et une personne que j’apprécie, mérite-t-il que j’envoie balader tout ce que nous avons partagé pendant des années pour l’histoire d’une alchimie momentanée ou d’un fantasme.
Est-ce que je me sens si mal pour me jeter dans les bras d’une personne bien sous tous rapports mais qui n’a rien à faire dans ma vie sentimentale ? Avec qui à part des ressentiments je ne dois rien avoir en commun ?
Je suis dans ce fouillis, pendant qu’il raccroche.
Il me regarde et me dit « Tu montes ? »