Est-ce l'évocation de Mongénéral, natif de Lille mais pas chti le moins du monde? Est-ce d'avoir retrouvé ce poème en patois posté hier? Ou bien est-ce le documentaire vu à la télé sur la « Grande Guerre », celle de 14, la « der des der »? J'ai la tête au Nord ce matin.
« Au Nord, il y avait les corons » chante-t-on maintenant au stade Bollaert... Mais je n'ai guère connu ces alignements de maisons ouvrières, construites par les compagnies minières pour ces hommes qu'elles envoyaient creuser le sous-sol, remonter « ch carbon » et avaler la poussière, pour mourir silicosés avant de jouir d'une retraite, d'être des « pinsionnés ». Une façon de régler le problème... Ah, la mine. Autant que je sache, personne parmi mes ancêtres n'y est descendu. Il y a eu d'autres métiers, aussi pénibles, mais pas la mine, la fosse disait-on. Pourtant, elle fait partie de mon patrimoine personnel, cette mine.
La guerre. Forcément, le 11 novembre. Et « Nord », c'est aussi le titre d'un livre de Céline, celui de la débâcle allemande et de la fuite à travers l'Allemagne vaincue et détruite. Mais bien sûr, c'est à « Voyage » que ramène la Grande Guerre... Les mots, les soldats errants dans la nuit. Et les images vues hier. Cette fois, c'est à mon grand père que je pense. Soldat en 17, il avait 18 ans. La guerre, celle là, il n'en parlait jamais, comme la plupart de ceux qui avaient vu cette horreur de près.
A travers lui, mon héritage, ce n'est pas la mine. C'est le canal. Le Nord sans canal, ce ne serait pas le Nord. La vie des mariniers n'était pas facile, elle non plus. Mon grand-père me parlait de ces chalands que l'on tirait à bras d'homme, c'est là qu'il était né, au hasard des voyages de labeur. Et puis, il y a eu les chevaux, et ensuite des tracteurs sur les chemins de hallage, et enfin l'automoteur. Je l'entends encore me raconter toute l'histoire. Je le vois. Et je retrouve le bord du canal, cette odeur étrange, du goudron chaud, de l'eau souillée. Et pourtant quelle bonne odeur, celle de l'enfance.
Ah, le canal. Même les rivières, on les appelait « canal ». Un jour ou l'autre, il faudra bien que je retourne au canal.