moi à l'époque ou je me laissais pousser les seins. j'avais un super job à ce moment là.
Ah, qu'il est loin le bon vieux temps, que je n'ai pas connu, ou il suffisait d'arborer une robe de secrétaire cochonne pour pouvoir décrocher un job!
Aujourd'hui, en théorie, si tu veux avoir un job, il faut faire des études. Exemple. Pour être agent d'accueil, il te faut au moins un bac +5, et de préférence un master de sociologie des publics. Qu'il ne soit accompagné d'aucune prétention salariale serait un plus. Ah et aussi, tu travailles les dimanches, mais pas les jours fériés, vu qu'ils sont payés double on les laisse aux anciens. C'était alléchant. J'ai accepté pardi.
Etrangement, j'ai rapidement réalisé qu'à accueillir des gens plus idiots, méchants mal polis et puants les uns que les autres, à garder le sourire même quand ils te disent que ton bouton là sur la pommette droite, il est vraiment moche, et qu'ils ont un truc infaillible pour traiter les cheveux gras et la mauvaise haleine, j'allais pas y trouver mon compte. Et que la bêtise et la méchanceté de mes semblables était comme un puits sans fond. Alors je me suis prise à rêver (et a dire au gens qui le méritaient d'aller se faire cuire un oeuf en leur brandissant mon majeur. Je me suis pas fait que des amis). Et dans mon rêve, je restais dans la même boite, et j'exerçais un métier à hauteur de mes compétences, et j'avais un salaire supérieur au montant de mon loyer, un bureau et COMBLE DU LUXE, une bouilloire. Alors je me suis collé une pancarte dans le dos qui disait "j'ai des compétences par milliers, sortez moi de là, donnez moi un vrai travail" (non pas que mon poste fut un faux travail, n'est ce pas, mais plutôt qu'il était autant adapté à ma personnalité qu'une casquette Eroik serait adaptée à ma garde robe). Et le ciel m'a entendu. L'une des collègues, avec une bouilloire dans son bureau, a décidé de procréer. L'occasion était trop belle. J'ai postulé à son remplacement. Les congés maternité, vraiment, quelle belle invention.
J'ai mis toutes les chances de mon côté pour l'entretien. J'avais pour moi l'expérience, les compétences, la maîtrise des outils. Pour l'entretien, j'ai même sorti la susnommée robe de secrétaire cochonne.
Sauf que. On a beau mettre tout ce qu'on peut de son côté, se persuader qu'on a toutes les qualités requises pour le poste, on peut pas lutter face à la concurrence. En l'occurrence, la concurrente, je l'ai pas trop calculée, rapport à son CV qui faisait comme la casquette Eroik de tout à l'heure sur ma couette. Et ben sur le coup, j'ai été bien conne, ne mâchons pas les mots.
La concurrente est blonde, parisienne (je n'ai rien contre les parisiens, entre nous soit dit, à partir du moment ou ils restent à paris. Dès qu'ils décident de quitter la capitale pour de plus vertes contrées, genre les miennes, et qu'ils décident de piquer les jobs qui devraient nous revenir sous prétexte que si on peut voir la tour eiffel de chez toi ou qu'on t'as déjà craché dans les cheveux dans le métro tu es tellement plus über mieux que tous ces pecnos du sud qui sont encore en maillot de bains au moins de novembre et qui disent putaing toutes les trois phases, j'ai envie de les éviscérer avant de les pendre avec leurs propres intestins. Fin de cette digression violente mais pas gratuite), et amatrice de bottes à bouts pointus.Pour moi c'est juste inconcevable qu'une fille qui met des bottes à bouts pointus me passe devant. Alors j'ai acheté la bouteille de champagne. Le contrat je l'avais déjà signé, et j'ai même acheté une boite de thé pour la mettre dans mon futur nouveau bureau. C'était évidemment acquis, vu que la chaise du bureau avait été designée pour mon petit popotin, et pas pour le popotin de la parisienne blonde à bouts pointus.
Mais tous ça, c'était avant le coup de fil de la big boss. Qui a été désolée de m'apprendre que malgré mes compétences et mon expérience qui ont étés unanimement saluées (je visualise la scène, une tribu de parisiens à bout pointus qui s'inclinent respectueusement devant mon CV), ma candidature n'avait pas été retenue. Mais qu'il fallait que je me rassure, puisque ça n'avait rien à voir avec mon profil.
Certes, donc, maintenant, on ne recrute plus les gens sur leur profils, leurs compétences, leurs qualités professionnelles? Il aurait donc fallu que j'investisse dans une paire de botte à bouts pointus et que je mette des accents circonflexes sur mes o (ouais ouais, je sais on dit pas raase mais rôôse)? Effectivement, je suis rassurée, avec de telles remarques, mon avenir est tout tracé. Mon futur se dégage, j'y vois plus clair.
Ma première mission sera donc d'étouffer la parisienne à bouts pointus avec les lambeaux de ma robe de secrétaire cochonne (hier, de rage, je l'ai dépiotée avec les dents, c'était pas beau à voir).
Ah et sinon, je cherche un job.