Comme à chaque fois que je voyage, et que j’ai un bon bout de temps à occuper dans un avion, j’en viens à me poser quelques questions. Encore une fois, j’ai voulu reprendre la lecture d’Addiction depuis le début. Je n’y suis pas arrivé. Sans doute étais-je fatigué mais cela n’explique pas tout.
Un commentaire, dont je remercie encore l’auteur, reçu sur le site « Inlibroveritas.net » me dit « il me semble que passées les quatre ou six premières pages, votre écriture se relâche et devient plus terne ». Or c’est bien le sentiment que m’inspire une lecture de mon propre texte. Le fait est que je n’ai fait aucun effort pour captiver le lecteur, ni même pour juste l’attirer et l’inciter à poursuivre. Forcément, je l’ai écrit pour moi, pour écrire et rien que pour cela, jamais pour que ce texte soit lu par des inconnus auxquels il est au départ étranger. Et pas même pour que je le lise moi-même.
Mais le résultat est là : on n’a pas vraiment envie de continuer la lecture. J’ai fait des modifications, certaines assez notables, depuis la première version mais je n’ai jusque là pas cherché à plaire au lecteur, ni, sans chercher cela, à juste l’intéresser pour lui donner envie d’aller plus loin.
Je n’ai écrit que pour moi. Ecrit-on autrement si on écrit pour être lu ? Sans doute, et je l’ai déjà fait dans d’autres contextes où il était naturel de penser au lecteur, où j’écrivais pour lui. Mais il s’agissait de textes fort différents, destinés à un public connu d’avance, auquel il s’agissait de donner une information, ou bien qu’il fallait convaincre. Là, c’est une histoire qui vient de la réalité, qu’il me fallait poser sur le papier pour la sortir de moi. Je l’ai écrite sans penser à un éventuel lecteur, sans même considérer ce lecteur dont l’existence n’avait guère de sens.
Aujourd’hui, l’objectif premier a été atteint : je suis libéré de cette histoire et de tout ce qui va avec. Et l’envie de la partager, venue aussitôt la dernière phrase écrite, est restée, a grossi plutôt. Seulement, le texte tel qu’il est ne peut atteindre cet objectif de partage parce qu’il est égoïste et ne s’ouvre pas au lecteur.
Ce ne sont pas de simples retouches qui y changeront beaucoup. Il faudrait que je refonde ce texte de fond en comble, sans doute en en réécrivant une bonne part, tout peut-être. Je me suis demandé ce que je voulais qu’un lecteur retienne et au fond, au-delà de l’histoire, c’est de la fin de l’addiction, de cette libération, une rédemption, qu’il est question. L’histoire, ses péripéties, ses instants de bonheur et les moments sordides, n’ont guère d’importance par eux-mêmes mais à quoi bon les raconter s’ils n’apportent rien à ce qui est mon propos quand je l’adresse au lecteur ?
Et puis, il reste l’écriture « qui se relâche et devient terne ». Qui aurait envie de poursuivre la lecture de phrases ternes ?
C’est en ayant ces réflexions que j’ai décidé de publier la fin du chapitre « fausse routine » qui était resté en suspens depuis longtemps. Il faut bien terminer, mais je n’irai pas plus loin, pas sous cette forme.
Je voudrais reprendre mon texte pour le rendre agréable à lire, pour que le lecteur ait toujours envie de passer à la phrase suivante, de tourner la page, et ne s’endorme pas comme je l’ai fait hier, quelque part au dessus de la Sibérie.