Dits de l'enfant

Publié le 23 novembre 2010 par Jlk


Pour Sophie, qui a 28 ans aujourd'hui, Julie et Lady L.

Qu’entrevoit l’enfant au tréfonds de son sommeil ? Quel spectacle ravissant, qui la fait soudain éclater de son rire argentin au milieu de la nuit ?
L’enfant dans la campagne. Longeant un champ de jeune blé dont elle caresse chaque épi, elle y va de son encouragement: “Pousse, blé, pousse donc...”
Le soir l’enfant demande au père, quand il vient lui souhaiter bonne nuit, de lui poser un baiser non seulement sur la joue, mais sur les mains et les pieds, les coudes et les genoux.
L’enfant passe une partie de ses journées à l’énonciation du monde, où tout est inventorié, nommé et qualifié, avec l’approbation du père qui la porte sur ses épaules. Ceci est un cheval: c’est un bon cheval. Cela est une marmotte: la marmotte est jolie. Et voici le chardon: attention ça pique !
L’enfant au père, l’air résolu: “Allons, papa, viens donc promenader !”
La mère, très fatiguée, s’étant réfugiée dans un fauteuil où elle se met à sangloter (les nerfs), l’enfant s’en vient vers elle et l’embrassant, lui demande d’un air bien grave: “Alors, dis-moi, tu as des problèmes ?”
L’enfant au père: “Viens maîtressier, allons faire de l’écrition”.
Ou encore: “Allez, Zorro, maintenant on ligote l’Indien au poteau de tortue”.
L’enfant les yeux au ciel : « Et le prénom de Dieu, c’est quoi ? »

Image: Soutine