Il y a un homme qui parle tout seul dans le métro. Ca arrive, je sais, mais le plus souvent, les gens ont la bienséance de sortir une oreillette quelconque, un micro ou un portable pour faire semblant, pour donner l’illusion qu’il parle à quelqu’un, pour donner le change aux autres qui l’entourent. L’air de dire: « ne vous inquiétez pas, non, je ne suis pas fou. Je ne parle ni à la lune ni à ma mère morte il y a trois ans et qui continue à m’engueuler ni, pire, à moi-même, tout haut, là devant tous, sans pudeur. » Le discours intérieur exposé au grand jour, c’est comme un naturiste perdu dans la jungle urbaine policée; c’est de l’obscène à l’état pur.
A côté de lui, une femme se dodeline, agite la tête dans un sens puis dans l’autre, emportée par une musique que nous n’entendons pas. Et moi, je suis coincée comme une lap danseuse qui aurait fait naufrage dans les bas-fonds.