Confidence

Publié le 03 décembre 2010 par Addiction2010

Ce texte, ce roman puisqu’il faut bien le ranger quelque part, je l’ai écrit parce que je ne pouvais faire autrement. Il est arrivé un moment où j’ai décidé que le dernier mot était posé. Je sais bien aujourd’hui que ce n’était qu’un brouillon mais à ce moment là, j’ai éprouvé un besoin irrépressible de le montrer. Il fallait que ce soit lu.

Il le fallait pour tourner la page. Pas celle de l’histoire qui est racontée, que chacun est libre de voir comme un amour, une passion, une erreur, ou que sais-je encore… Cette page là est tournée, ou bien elle ne l’est pas, selon les jours. Mais ce n’est plus important. Non, c’est la page de l’addiction dont j’ai souffert trop longtemps, qui a tant détruit. Certaines circonstances m’ont amené à en voir la face cachée, sans doute encore plus sordide qu’on l’imagine. J’étais prisonnier, j’ai aperçu la lumière. Et j’ai écrit, empruntant sans doute trop à la réalité, ajoutant parfois des détails inutiles, que j’ai ensuite éliminés, un peu tard.

Oui, trop tard. Car ce récit, qui était pour moi celui de la fin d’une errance qui n’avait que trop duré, j’ai voulu le partager avec celle qui pouvait, à juste titre, se sentir la plus blessée. Elle l’a lu. Hélas, elle n’a retenu que les détails. Ils étaient parfois inventés, ou maladroitement modifiés pour donner plus de relief à un instant raconté. Elle les a pris pour la réalité brute. Peut-être finira-t-elle par voir ce que je voulais qu’elle découvre. Oui, j’ai été un mari infidèle mais il y a des pas que je n’avais jamais faits. Jusque là. Et les avoir fait, avoir aimé cette femme de tout mon cœur, m’a obligé à retourner mon obsession. Je ne pourrai plus prendre une femme, lui donner quelques billets, et savoir que peut-être, sûrement, il y a quelque part un homme qui l’aime et la voudrait, mais ne peut lui offrir cette vie. Je n’ai toujours pas compris comment cette addiction s’était emparée de moi, je ne chercherai plus à le savoir, cela n’a aucune importance.

J’aurais voulu qu’une femme, celle à qui j’ai donné ce récit, celle qui l’a lu, comprenne enfin ce malheur qui nous a abattus. Cette femme, je l’ai aimée à la folie. Je n’ai jamais cessé de l’aimer, même quand je ne voyais plus qu’une autre. Je l’ai haïe aussi. La haine n’est que l’amour déçu. Je sais qu’elle ne l’accepte pas, qu’elle ne l’acceptera pas. Mais ai-je d’autre choix que de lui demander de me rejoindre sur mon chemin de rédemption ? Il n’y en a pas et savoir que cela n’est pas possible n’y change rien.

Est-ce pour cela que j’écris chaque jour ? Est-ce une autre fuite ? Mais écrire, je l’ai toujours fait. Cette fois, j’ai besoin de savoir que c’est lu. Il arrive que je sache qui le lit, par les quelques mots qui me sont adressés. C‘est réconfortant. Peut-être certaines de celles là vont-elle me voir en monstre. Rassurez vous, c’est aussi ainsi que parfois je me ressens. Seulement, il faut bien que je vive avec cela. Ou alors, voudriez vous que je retrouve les fantômes du canal ? Mais ces mots là, je les emprunte à mon autre roman, dont vous n’avez rien vu. Le canal. Il faudra bien que je règle aussi mes comptes avec lui.

Mais d’abord, c’est avec l’addiction qu’il faut finir de régler mes comptes. Je l’ai vaincue, mais je me méfie d’elle, je sais qu’elle est là, dans l’ombre, prête à surgir et à s’emparer de moi. Je ne veux pas lui en laisser l’occasion. C’est pour cela que finalement, je finirai par publier tout ce récit.

Canal (vers 1960)