Vous l’avez sûrement remarqué, quelque chose a changé sur Route de Nuit cette semaine. Depuis longtemps ici, j’ai pris l’habitude de vous parler de musique en vous parlant de moi, directement. Je dois reconnaître que j’en ai eu besoin à une époque. Mais depuis que je suis rentré de Montréal et de Bruxelles, beaucoup de choses ont changé. Je n’ai plus tellement envie de parler de moi comme j’ai pu le faire avant. Je crois que je l’ai compris quand j’ai écrit ce texte sur le théâtre. Je n’ai pas vraiment réfléchi à ce virage, il s’est imposé de lui-même.
Quand j’ai commencé, j’écrivais des fictions. Des dizaines de pages passées à raconter des histoires comme ça, sans vraiment avoir de plan, sans vraiment savoir où j’emmènerais ces personnages. Finalement, je n’ai jamais été au bout d’aucune de ces histoires parce que je n’ai jamais su comment encadrer ces textes-là. Écrire un roman, c’était trop exigeant. Écrire des nouvelles, c’était trop court. Et puis j’ai laissé tomber l’écriture pendant un moment, pour y revenir plus ou moins à cause de la musique. Aujourd’hui, je ne peux pas écrire sans musique dans les oreilles, c’est d’ailleurs pour cela que j’ai écrit ce texte sur les phobies il y a quelques mois.
Alors quand j’ai écouté Dinah Washington et Max Richter qui m’ont inspiré L’odeur du velours rouge, j’ai vu cette danseuse en fin de carrière s’assoir au bord de la scène devant une salle vide. Et je me suis rappelé pourquoi j’aimais ces salles vides. De même quand j’ai vu cet homme sous l’abribus en entendant Vyvienne Long chanter qu’elle est toujours en retard… C’était bon d’élargir l’éventail des possibles, de tirer quelque chose de concret de ces situations inspirantes.
Je ne sais pas ce que je vais faire de ces fictions de minuit. La seule certitude que j’ai, c’est que maintenant que je sais que je peux vous emmener sur d’autres routes, je ne vais pas me gêner. Surtout si ça peut me permettre de ne plus écrire à ma première personne. Il est temps de remettre la musique au centre de ce qui se fait par ici.