Et c’est reparti ! Les toutes premières pages de ce projet de texte à propos duquel j’écrivais hier existent. Il s’est emparé de moi et je n’ai guère résisté. Le pouvais-je de toute manière ? J’ai appris ces derniers mois qu’il est impossible de refuser cela. Nous sommes plus nombreux qu’on ne le croit à être prisonniers de ce besoin de traduire en mots que l’on pose, en noir sur blanc, à la plume ou plus souvent au clavier, ce qui nous occupe l’esprit. Il nous faut partager, avec des inconnus qui parfois nous répondent, et deviennent moins anonymes tout en restant lointains. Nous savons que nos écrits ne deviendront, pour la plupart, jamais des livres, qu’ils n’atteindront jamais ce large public que nous ne recherchons pas vraiment.
Ce nouveau texte m’habite. Je n’en ai rien livré dans mon précédent post, ou si peu. J’ai lâché ce « je t’aime » qui serait un but mais rien des circonstances, essentielles, qui l’entourent. On me dit que je montre de l’énergie, que sans doute cela veut dire que je surmonte certaines épreuves. Me le dirait-on encore si on avait lu les quelques paragraphes, noirs et joyeux, qui donnent une existence à ce qui n’était, hier matin, qu’une idée vague.
Que deviendra-t-il ? Un roman, une nouvelle, ou juste quelques fragments perdus comme tant d’autres… J’y pensais hier soir en cherchant le sommeil. Je n’ai pas de souvenir précis de mes premières tentatives d’écriture. Je n’avais pas dix ans quand j’ai noirci mes premiers cahiers, de mauvaises imitations de mes lectures d’alors, insérant même dans mon « club des trois » quelques illustration comme le faisait la bibliothèque rose pour reposer, j’imagine, les jeunes lecteurs. J’ai tâté de toutes les formes d’écriture : articles, chansons, poèmes, essai philosophique (hélas…), même un discours de ministre (jamais prononcé), et mon préféré: le pamphlet. Qu’il est bon de tremper sa plume dans l’acide. Mais il y a longtemps que l’on a abandonné la plume et s’il ne manque pas de sujets, ni de gens à propos de qui j’ai envie d’être caustique, c’est l’inspiration qui me fait défaut. Et puis, à quoi bon ajouter encore quelques feuilles pour condamner les monstres qui prétendent nous gouverner ou nous faire suivre leurs lois scélérates. Il me reste, de temps en temps, le billet d’humeur, petit coup de gueule dans l’eau, ersatz de pamphlet.
Il est un genre auquel je n’ai pas goûté : c’est le théâtre. « Ô rage, Ô désespoir, le petit chat est mort ». Non, l’envie m’est parfois venue, j’ai admiré les textes dits par les acteurs, mais je ne m’en suis jamais senti capable. Non, même pas l’acte un, scène première. J’ai bien eu quelques camarades qui ont tenté l’aventure des planches, certains ont même écrit, mais je n’ai jamais assez fréquenté ce monde là, autrement qu’en spectateur, pour être pris de ce besoin dont je ne me sens pas capable. Et puis je sais bien que c’est l’amour qui me bouge. Sans doute, si j’avais aimé une comédienne durant mes jeunes années aurais-je voulu écrire pour elle. Sans doute aussi cela aurait-il été assez mauvais pour lui fournir le prétexte d’une rupture.
Ainsi donc, je me suis lancé dans une nouvelle aventure d’écriture alors que les précédentes ne m’ont pas tout à fait quitté. Je dois éviter que l’une n’influence l’autre. Le petit chat n’est pas mort, il est éternel.