Dites donc, cela fait un moment que je n’ai pas écrit ici le mot « amour ». Faut-il en déduire que mon cœur est calmé, que j’ai finalement accepté d’oublier celle que nous continuerons d’appeler ici Raphaëlle ? Ainsi va la vie. C’était un amour impossible. Contrairement à ce qui arrive dans le roman, là où son récit abandonne enfin la réalité, nous avons continué à nous voir, en amis, alors que nous n’étions plus amants. Il restait beaucoup de tendresse entre nous, et plusieurs fois, nous avons été très près de nous retrouver un peu plus. J’aime autant que cela ne se soit pas produit. Elle a fini par me dire qu’elle avait quelqu’un, que sa vie n’était plus repoussante, comme elle le criait en me rejetant. Je savais que je n’avais jamais eu grand-chose à lui offrir, que l’amour, cet amour là, finalement n’était pas capable de surmonter les épreuves. Nous avons eu des périodes d’absence, des conversations, d’autres absences. Je lui ai écrit une lettre d’adieux, qu’elle n’a pas plus lue que mes ridicules billets jetés au vent du réseau et aux yeux de qui veut bien les voir. Elle sait bien que je reste là, que je serai disponible si elle le souhaite. Nous savons que nous ne serons plus amants.
Je me demande parfois si je l’aime encore. Il m’arrive de vouloir croire que je ne l’ai jamais aimée, du moins pas autant que je le croyais. Elle a toujours eu quelques personnes près d’elle qui lui disaient que je n’étais pas un homme pour elle, ceux là on fini par la convaincre. Ce ne fut pas dur, au fond il suffisait d’un rien, d’un grain de sable. Ils avaient raison d’ailleurs, puisque je n’ai pas su la sortir de cette désolation où elle était, où elle errait, qui lui faisait murmurer ou hurler que sa vie était repoussante. C’est mon seul regret, même si je sais que ce que nous avons vécu ensemble l’a finalement aidé aussi à tourner cette page, à quitter cette existence qu’elle détestait malgré les sourires qu’elle montrait et où j’espère qu’elle ne retournera jamais. Et moi non plus.
L’amour obsédant a desserré son étreinte. Si je ne l’ai pas oubliée, elle n’est plus l’objet de toutes mes pensées. Ecrire m’a beaucoup aidé même si elle a été présente, d’une manière ou d’une autre, dans ces milliers de mots que j’ai posés sur des pages ces derniers mois. Et même si elle sera présente, d’une autre façon, dans tout ce que j’écrirai ces prochains mois. J’ai parfois été très impudique sur ce blog, je m’en étonne car je ne suis pas du tout extraverti. On peut s’exposer quand on reste à peu près anonyme. C’est peut-être aussi pour cela que j’ai abandonné l’idée de retravailler mon « Addiction » pour le rendre conforme aux critères d’un éditeur. Le partager sur internet me convient, je reste, comme les autres « écrivains amateurs », caché et exposé. Bien sûr, il y a les quelques personnes avec qui j’entretiens une relation, voire une affection, épistolaire grâce à ce blog et d’autres sites. Je ne suis plus vraiment caché et anonyme pour ces personnes là, mais pas non plus une vraie personne, que l’on voit, que l’on touche, d’une main ou d’une joue et dont on voit un peu plus que ce qu’elle accepte de montrer en choisissant les sentiments et les tourment qui peuvent être partagés.
Jusqu’au dernier souffle, nous avons tous de l’amour à donner, même ceux et celles qui se prétendent le cœur sec et s’enferment dans cette carapace d’indifférence où ils se croient en sécurité. On n’est jamais en sécurité dans la mer des sentiments. Ce sacré Cupidon nous laisse penser qu’il est noyé et emporté mais il reste aux aguets, vif comme au premier jour, prêt à nous transpercer.