Orange : 3900, 22 Minutes, 7€48, 72h De Panne Pour Ma Pomme.
Publié le 16 janvier 2008 par Mélina Loupia
Ce matin, ô joie, dans ma boite aux lettres qui n'existe pas vraiment, aucune proposition de gain à placer off-shore, aucune opportunité de m'habiller
beaucoup pour pas beaucoup, et encore moins de newsletter de conseils beauté, voyage ou cuisine au beurre.
Je ne reçois pas ces fameux spams, spoofs, phishes, enfin, l'équivalent de ce qu'on appelle les prospectus dans la cage à lettres devant la maison.
Il paraît que c'est bon pour la planète, qu'il faut réduire nos déchets, que ça déborde.
Là, même pas besoin de froisser ce ramassis de conneries, mon dossier spams est vierge, a passé la nuit seul.
Pourtant, je n'entame pas la danse de la pluie pour autant.
En effet, l'arborescence destinée aux vrais courriers, ceux qui comptent, que j'attends ou dont je sais qu'ils m'ont été envoyés, («Ecoute je t'envoie un mail tout de suite pour confirmer", "
Nous venons de vous envoyer la confirmation de votre commande par mail.", "test"...), est elle aussi immaculée.
Et là, l'effet magique disparaît rapidement.
Je vais calmer l'angoisse avec ma tasse de café dans le cellier où la nicotine délocalisée saura certainement raison me faire retrouver.
Quand je quitte le fumoir, Marilion refuse de libérer le moindre petit mail.
Malgré mes prières, les mains jointes sur son capot sérigraphié verni, suivi d'un secouage virtuel, lui-même emboité d'insultes en regard de Windows Live One Care qui doit encore avoir tourné
toute la nuit sous acide, rien n'y fait, toujours rien.
Je checke Windows Live Mail et l'interface Orange.fr sans arrêt, un peu comme l'adolescente qui décroche son petit téléphone rose translucide toutes les 2 minutes sous prétexte que
Kimberley lui a dit que Sabrina a entendu Cindy répéter à la sœur de Kelly que le cousin de Kevin pourrait l'appeler.
Rien.
A 11h, alors que j'allais lâcher l'affaire pour un repas d'anniversaire, je décide d'appeler Orange. Sans doute 3 minutes suffiraient pour m'entendre dire que mon pare-feu brûle tous mes mails et
qu'Orange n'y est pour rien.
11h04 : "Bonjour, cet appel vous sera facturé 0.34 centimes d'Euros par minute."
11h07 : "Bonjour, bienvenue chez Orange, Cunégondasse à votre service veuillez me donner vos références clients s'il vous plait.
-Bonjour, ah euh, je ne les ai pas sous les yeux, je vais devoir chercher, merci de patienter.
-...
-Vous m'avez entendue?
-Oui, vous allez chercher vos papiers."
Je renverse d'une main le tiroir du bureau, qui se fracasse et étale à peu près 2 mois d'administration en retard au sol, le hasard fait qu'une des factures téléphone soit en haut du bordel. Je
fournis ce que je pense être ce qu'elle me demande.
"Ah non, c'est pas ça madame, bon, donnez-moi votre numéro de téléphone, c'est pareil.
-... 04.68.bip.bip.bip
-...
-Allô?
-Oui?
-Donc, depuis ce matin, je ne reçois plus aucun mail dans ma boite aux lettres.
-Interface Orange ou Outlook Express.
-Les 2, si je ne reçois pas sur l'interface, je ne reçois pas non plus sur Outlook Express.
-Tout à fait. Avez-vous pensé à débrancher et rebrancher votre Livebox?
-J'ai procédé à tous les tests, y compris celui de désactiver le pare-feu, de m'envoyer des mails test et d'aller regarder sur d'autres adresses non-Orange.
-Je vais vous demander de vous connecter sur votre interface Orange et de vous envoyer à nouveau un message de test.
-J'y suis.
-...
-Donc je m'envoie un mail?
-Oui mais ne l'envoyez que quand vous y serez invitée.
-Très bien."
Je m'exécute. Me sentant comme épiée, je fais sobre. "Objet: test/ corps du message: test". Je songe en rougissant au test procédé plus tôt dans lequel je m'étais envoyée mes plus sincères
bizettes, de penser à aller à l'ANPE demain, de pas trop picoler au repas de midi, lorsque la Cunégondasse me tire de ma propre imagination.
"S'l vous plait?
-Oui?
-Maintenant, cliquez sur "envoyer".
-C'est fait.
-...
-Donc, je reviens dans ma boite de réception?
-Attendez s'il vous plait."
Je trouve cette conseillère non seulement complètement décalée dans le temps, mais encore, elle ne semble pas tout à fait saisir l'objet de ma requête, dans la mesure où je lui ai déjà assuré de
m'être envoyée des messages test. Soit, je découvre encore un accent étranger plutôt plaisant et je tue le temps, à 34 cents par minute.
"S'il vous plait? Avez-vous reçu votre message?
-Non, je n'ai rien, mais je dois vous signaler que si aujourd'hui, je n'ai reçu absolument aucun message, depuis le 1er janvier, je reçois des mails en retard, et certains pas du tout. J'ai
souvent du mal à accéder à ma boite et parfois, je ne peux pas le faire.
-Aujourd'hui, nous allons tenter de résoudre le problème présent. Vous allez maintenant m'envoyer un mail."
Belote.
Elle me communique son adresse et je m'exécute.
Elle ne reçoit rien.
Nous entamons alors la 19ème minute de conversation à mes frais.
"Je vais vous demander votre mot de passe. Comme la conversation se coupe au bout de 22 minutes, je vous rappellerai si d'ici là, le problème n'est pas résolu.
-Entendu, je vous donne mon mot de passe?
-S'il vous plait, lettre par lettre."
Là, j'ai franchement honte.
Que ce soit l'ancien, ou le nouveau, que j'ai mis en place il y a un mois environ, il se trouve qu'une partie de ma vie privée est un peu dévoilée à ce moment-là de la conversation. Je sens
bien dans le ton de sa voix le petit sourire en coin. Elle doit certainement avoir mis son téléphone en mains libres pour que tous ses collègues profitent de la scène et en fassent leurs choux
gras à la cantine.
"Je suis désolée, mais aucun des 2 ne passe.
-C'est très curieux, car avec l'ancien, je recevais les mails, avec le nouveau aussi, jusqu'aux incidents de ces derniers jours.
-Nous allons essayer autre chose. Vous allez vous connecter sur l'identifiant principal et m'envoyer un mail.
-D'accord. Je vous demande juste de patienter le temps que je retrouve les identifiants principaux.
-Vous êtes sûre d'utiliser uniquement cet alias et non d'autres identifiants?
-Oui, depuis 6 ans oui. Je chercher le mot de passe de l'identifiant principal.
-..."
En fait, je donne de vagues coups de pieds dans le tas de courriers à terre, le hasard pourrait se produire 2 fois au même endroit et quasiment au même moment, mais tout ce que je réussis à
faire, c'est envoyer glisser la paperasse sous Ténérife, dont l'accès au bas de caisse est aussi aisé que de chausser un 41 dans une botte de cuir en 36.
Je fonce dans le bureau de Copilote, à la façon des grands explorateurs des temps modernes, essoufflée, la voix tremblante par le mouvement de mon corps qui marche en courant, pousse la porte
d'un pied, la chaise de l'autre et fait tomber le contenu du tiroir coulissant.
"Je suis désolée, mais je ne retrouve pas le mot de passe de l'identifiant principal, pourriez-vous m'aider?
-Vous devez les avoir sur le récapitulatif de votre inscription.
-Oui, je sais, juste je ne sais pas où il est, en imaginant que j'aie perdu ce document, comment retrouver les identifiants?
-Vous devez les conserver, dans le cas contraire, il faut faire une demande à notre service clientèle qui vous les transmettra par courrier et...
-C'est bon je les ai retrouvés.
-Votre conversation a dépassé le délai normal, elle va être coupée."
Je raccroche.
Elle me rappelle.
Rebelote.
Je me connecte en fait sur l'interface de Copilote, qui n'avait jamais changé le mot de passe original, que jamais je n'aurais pu retrouver, étant composé de lettres mêlées de chiffres.
Je clique sur "envoyer" après qu'elle me l'a ordonnée et j'attends.
"C'est bon, je viens de le recevoir, il ne s'agit donc pas d'un problème lié à votre ordinateur mais bien d'un incident de la part d'Orange sur votre compte personnel. Je mets immédiatement votre
incident dans le dosser d'un expert qui vous rappellera dans la journée, restez à notre disposition.
-Mais concernant les mails, ils ont disparu?
-Non madame...LOUPIA, ils sont simplement bloquées et stockés quelque part et notre expert va tenter de les débloquer. Je vous souhaite une bonne journée."
Alors que vers 20h45, je racontais à Copilote que j'imaginais mes mails dans une petite caisse, à la dérive sur l'océan Orange, poussant de petits cris fatigués, espérant qu'on vienne les
secourir, affamés, à bout de force, en hypothermie, certains étant probablement décédés, je reçois enfin, au compte-goutte, quelques uns d'entre les plus robustes, en matière des spams tant
redoutés et de mes innombrables messages de test. Pour le reste, ceux que j'attends vraiment, silence radio.
Dès 23h50, après un mail de confirmation attendu depuis plus de 5 minutes, suite à une commande, je retombe dans le cauchemar éveillé de la matinée.
Que je fais cesser.
J'appelle le 3900 à nouveau.
"Bonsoir, Amaurycool à votre service, veuillez me donnez votre numéro de client s'il vous plait.
-J'ai déjà appelé ce matin et mon numéro de téléphone a suffit, je vous le donne?
-Ah mais vous avez tout à fait raison Madame, je vous écoute."
Et je lui raconte, par le menu, l'épopée passée.
"En effet, c'est tout à fait normal que ce soit pas normal, moi, tout ce que je vois, en effet, c'est qu'un incident a été déclaré à 18h30 et qu'il est en cours.
-J'ai tout de même appelé à 11h.
-Je comprends que ça ne cadre pas, mais vous avez raison, c'est normal que ce soit pas normal.
-J'ai attendu toute la journée que l'expert me rappelle, on m'a assurée au téléphone ce matin que ce serait résolu dans l'après-midi, ce n'est pas le cas, une partie de mon travail dépend de
quelques uns de ces mails, et j'ai dépensé 7€48 (22*0.34) pour finalement devoir vous rappeler ce soir au sujet d'un incident qui n'est pas réparé et qui n'est pas de mon fait.
-Mais vous avez raison et c'est normal que ce soit pas normal, soyez rassurée, même si je ne veux pas vous mentir pour vous donner de faux espoirs, sachez que le problème sera réglé entre 24 et
72 heures. Quant aux mails, vous êtes obligée de les recevoir. Tout mail envoyé doit être reçu. C'est obligé. Voilà. Je vous remercie de votre calme, patience et bonne soirée madame...
LOUPIAMélina."
Il est 1h57.
Dans 9 heures, les premières 24 heures du délai de réparation seront passées.
Compte-tenu du fait que dans 7 heures, EDF effectue des travaux de maintenance sur ma ligne électrique et me privera donc de l'accès à mon téléphone filaire pendant 4 heures, que je ne serai pas
chez moi entre 9 et 12h en raison du rendez-vous avec l'ANPE qui me privera d'une partie de ma journée durant laquelle j'aurais aimé continuer à achever le tapuscrit d'un manuscrit, cette
semaine, je sens que d'entrée, elle pue.