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Roberto Mussapi | Le sommeil des héros

Publié le 18 décembre 2010 par Angèle Paoli
«  Poésie d'un jour

IL SONNO DEGLI EROI

Poi in pochi istanti discese il buio
e le anime si staccarono dai corpi prima del sonno,
si unirono all’ombra densa e irrorante
che era salita tra le finestre e i lampioni
e un altro respiro unì i guerrieri sotto le stelle.
A terra, da qualche finestra brillava una luce
e nelle lunghe file dei marciapiedi le conche
lucenti e le arcate dei portoni indicavano la salita
che ognuno aveva compiuto al declinare del giorno
verso il cuore segreto del palazzo e del tempo
nella stanza che aveva atteso l’ombra come una sposa
e che nel silenzio delle strade asfaltate, nel respiro
dei platani del viale si congiunse al suo uomo
che chiuse gli occhi nell’abbraccio delle pareti
e in loro fu stretto e dormì guardato
dalla camicia appesa alla finestra come uno scudo
nell'ora in cui l’amico del giorno a venire
respirava il suo stesso respiro, nell’ora
che il buio ancora ricordava nei rossi bagliori
lei che era passata sugli occhi e sui feriti
lasciando l’umida promessa della sua mano fatata,
la dolce, irraggiungibile, materna sera.

Roberto Mussapi, Gita meridiana, Mondadori, 1990 (Nuova Edizione Jaca Book, settembre 2009), in Poeti italiani del secondo Novecento, Oscar Mondadori, Classici Moderni, 2004, volume secondo, pag. 977.


LE SOMMEIL DES HÉROS

Puis en peu d’instants l’obscurité descendit
et les âmes se détachèrent des corps avant le sommeil,
s’unirent à l’ombre dense baignée de rosée
qui était montée entre les fenêtres et les réverbères,
et un autre souffle unit les guerriers sous les étoiles.
Au sol, des lumières tombant de quelques fenêtres brillaient,
et dans les longues enfilades des trottoirs les vasques
lumineuses et les arcades des portes cochères indiquaient la montée
que chacun avait accomplie au déclin du jour
vers le cœur secret de l’immeuble et du temps
dans la chambre qui avait attendu l’ombre comme une épouse
et qui dans le silence des rues asphaltées, dans la respiration
des platanes de l’avenue s’est unie à son homme
qui a fermé les yeux sous l’étreinte des murs
et s’y est tenu serré, a dormi, veillé
par la chemise suspendue à la fenêtre comme un écu,
à l’heure où l’ennemi du jour à venir
respirait du même souffle, à l’heure
où l’obscurité dans les lueurs rouges se souvenait encore
d’elle qui était passée sur les yeux et sur les blessés,
laissant la promesse humide de sa main fée,
la douce, inaccessible, maternelle soirée.

Roberto Mussapi, Le Voyage de midi, suivi de Voix du fond de la nuit, Éditions Gallimard, Collection L’Arpenteur, 1999, pp.57-58. Traduit de l’italien par Jean-Yves Masson. Préface d’Yves Bonnefoy.


Mussapi Le Voyage de Midi 3


   Roberto Mussapi est né à Cuneo, dans le Piémont, en 1952. Diplômé es-Lettres en 1977, il se rend à Bologne où il travaille pour la maison d’édition Cappelli. À partir de 1982, il s’installe à Milan et dirige la collection « I poeti » chez Jaca Book. Rédacteur dans la revue Niebo, il traduit aussi Marlowe, Melville et Stevenson. Essayiste et dramaturge, Roberto Mussapi est reconnu comme l’un des poètes italiens majeurs de ces dernières décennies.
  D’inspiration néo-orphique, la poésie de Roberto Mussapi est portée par une haute tension mystique à laquelle les références à la Sagesse et à la mythologie ne sont pas étrangères. Dans Gita meridiana (Le Voyage de midi), son recueil le plus marquant et le plus abouti, la dimension mythologique persiste mais évolue vers la contemplation d’un monde perdu. Le lecteur ne peut se dérober à l’inquiétude qui sourd, lourde du questionnement du poète dans son face-à-face avec le « néant de tout », et de « l’illusoire de toutes les représentations que la vie se forme » et du « sentiment que vivant ou mort l’être humain est privé de sens, passe sur terre sans rien pouvoir y inscrire, demeure étranger au monde c’est-à-dire tout aussi bien à soi-même » (Yves Bonnefoy).



ROBERTO MUSSAPI

Roberto Mussapi, Portrait 3

Source

■ Voir/écouter aussi ▼

→ (sur le site de Pierre Perrin de Chassagne) une lecture du Voyage de midi (article paru dans La Nouvelle Revue française, n° 552, janvier 2000)
→ (sur le site du Matricule des Anges) un article de Marc Blanchet sur Le Voyage de midi et une interview de Roberto Mussapi
→ (sur le site de la revue Prétexte) d’autres extraits du Voyage de midi
→ (sur books.google.fr) aperçu limité de Gita meridiana (Nuova Edizione Jaca Book, 2009)
→ (dans Les Carnets d’Eucharis) un extrait du recueil Lumière frontale (+ une notice bio-bibliographique)
→ (dans Les Carnets d’Eucharis)
Yves Bonnefoy interprète deux poèmes de Roberto Mussapi
→ (sur Books Web.tv) Roberto Mussapi parle de son recueil La stoffa dell'ombra e delle cose, paru chez Mondadori en 2007



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