Magazine Journal intime
Easy love.
Publié le 23 décembre 2010 par M.
C'était pas évident les premières heures de ne pas marcher dans le cercle, on est si proche toujours du vide, claquer en boule dans un fossé humide ; c'était pas évident mais c'est l'enjeu aussi : ne pas sauter dans les flaques puis se laisser repêcher, sortir de l'eau, sécher à sa propre chaleur. C'est pas évident l'arrogance mais tellement plus facile de survivre en évitant les balles. Je me souviens bien sûr avoir dit un jour à propos de l'arrogance : toujours jugée, toujours coupable ; mais c'était une autre année, une autre fille et le poids des fractures. Rien n'accepte jamais de se figer. J'ai arrêté le scotch et les bassesses craintives, même en ayant tout juste l'assurance encore emballée qu'on gagne à planter ses ongles dans une falaise. On s'aperçoit presque trop vite qu'il s'agit seulement de craie et qu'on peut y graver sa propre version de l'histoire. J'ai recraché ma langue et rampé avec la terreur comme un corps entier contre moi, mais tu sais plus t'es haut plus la vue est si belle qu'elle t'en arrache les yeux, alors je ne saurais sans doute pas m'arrêter à ça. Peu importe le nombre de tes phrases identiques, une même parole ne peut pas compter deux fois pareil. On barre. C'est le genre de truc pour lequel les chiffres sont forcément inexacts. Je brûle les reliques pour avoir plus de lumière, les souvenirs suffisent je n'ai plus besoin de preuves. C'était comme des ventouses qui me conservaient les épaules courbées dans le fond du bocal. Un grotesque poulet plumé dans le formol. J'aurais du te dire que je t'aimais quand c'était vrai mais ça n'aurait sans doute rien changé. Quatre grosses aiguilles et un trou plus tard mon dos se redresse à l'insolence. Je n'ai plus besoin de preuves parce que je ne suis plus la seule à me rappeler. Après c'est facile, on se dit soudain qu'on a pas besoin de tout l'amour du monde, alors on éclate de rire et puis on respire un bon coup. Et ensuite. Je sais exactement ce qui reste une fois l'ardoise effacée, et c'est pas grand chose à vue d'oeil mais comme j'idéalise à mort ça reste largement suffisant pour une apocalypse.