Pub gratuite

Je n'irai pas cette année trainer chez G Detou, je ne lirai pas les étiquettes insolites qui excitent les papilles, je n'achèterai pas ces improbables ingrédients que l'on ne trouve pas ailleurs, ou alors à un prix exorbitant. Cette année, place à l'austérité. Alors je ferai avec ce qu'il me reste encore des provisions achetées au temps où je le pouvais encore. La poudre d'amande, américaine car à quoi bon chercher la perfection pour une simple galette, servira encore pour une ou deux, si j'ai le courage d'étaler la pâte feuilletée, ou plutôt d'aplatir une pâte simple de farine et d'eau sur laquelle j'installerai un beurre ni trop dur ni trop mou avant de plier le tout, de laisser reposer et de plier encore, dans l'autre sens pour obtenir ce merveilleux feuilletage, sans doute moins beau que celui du pâtissier mais tellement meilleur puisque je sais tout ce qui s'y trouve, passion comprise. Quelques gousses de vanille tahitienne attendent encore de parfumer une crème avant de finir leur vie dans un autre bocal où ce qui restera de leur arôme s'emparera du sucre.

Ainsi, je n'irai pas chez G Detou. Et pourtant, je pourrais simplement m'y abandonner aux épices, juste les admirer et les convoiter. Mais je ne pourrais pas acheter et repartir sans emporter quelques souvenirs et projets de gâteaux, de préparations subtiles ou toutes simples. Pas de pistaches donc, sous aucune forme, pas même en pâte pour préparer une glace ou alors une sauce qui surprendrait si doucement les palais européens.

Il me reste au moins du sel rose pour plusieurs années, petit « secret » de charcutier qui permet au foie gras de ne pas trop s'oxyder à l'air. De toute manière, je n'ai pas non plus les moyens de ce luxe là, ni le foie rapporté encore chaud d'une ferme près de Toulouse cuisiné le soir même, ni celui d'origine douteuse que l'on trouve conditionné sous vide dans les supermarchés et qui perd son gras si facilement. De meilleurs jours viendront, le sel rose trouvera son emploi.

Une dernière fois, je n'irai pas chez G Detou cet hiver. Alors, pour que cette extraordinaire épicerie me pardonne, je lui fais une pub, gratuite.