Magazine Journal intime

Episode 31 : Monsieur Belmondo

Publié le 17 janvier 2008 par Michel Crémadès
Entre deux répétitions de « Croque-monsieur », je reprends ma plume, pardon pour ce long silence, mais comme disait Confucius :   « Le silence est une grande révélation »…   C’est fait, adieu 2007 qui fut une année de chien…   La vie des intermittents est faite de hauts et de bas, j'avoue que 2007 fut la plus dure pour moi. Pas d'appels, pas de tournages, no théâtre, bref, on se demande pourquoi les professionnels vous détestent à ce point et pourquoi on ne travaille plus! C'est l'horreur. Bonjour 2008 que je vais essayer de tenir en laisse !   Merci à Fabien Azzopardi, photographe de renom, pour ces deux belles photos !   Je voulais tout d’abord vous souhaiter à toutes et à tous une excellente 2008 ! Qu’elle soit pétillante, que cette nouvelle année puisse vous donner la santé, le bonheur et surtout l’amour !!!   Cette belle citation d’Eluard : « La courbe de tes yeux fait le tour de mon cœur. »   Bien, rangez vos mouchoirs et passons aux années 1999-2000. Je pars en tournée théâtrale avec un comédien qui a illuminé ma jeunesse. J’avais 16 ans lorsque j’étais allé le voir dans ce film que j’adore : « Le Casse » avec Omar Sharif, Robert Hossein… Je n’aurais jamais imaginé qu’un jour je serais sur scène en face de Monsieur Jean-Paul Belmondo !!! La mise en scène était signée par le très fidèle Bernard Murat, pièce écrite par Eric-Emmanuel Schmitt, bref tous les ingrédients étaient réunis pour que cette tournée soit magnifique. Nous étions une vingtaine de comédiens, plus la technique… On se serait cru sous le plus grand chapiteau du monde.   Jean-Paul est un grand farceur. Il faut une bonne dose de concentration pour ne pas rire en scène à cause de lui. Lorsque ça lui prend, il traverse le plateau caché sous une couverture en poussant des cris de chimpanzé ou bien il fait passer un ballon de foot sur le plateau. Pour du théâtre dont l’action se situe au 19° siècle…
Je démarrais la pièce avec Philippe Khorsand et chaque soir nous devions être blindés car on ne savait pas à quelle sauce nous allions être mangés !??? Mais moi-même j’ai un tempérament quelque peu blagueur et avec mon ami Urbain Cancelier, qui jouait dans la pièce, nous ne nous sommes pas privés de lui en faire quelques-unes unes à l’ami Jean-Paul. Lorsqu’il était sur scène, je me déguisais régulièrement en toute sorte de choses, cela hors de portée de vue du public évidemment. Sur la photo, c’était la soirée "Le lapin de Chantal Goya..." J’attendais sa grande scène d’émotion et gesticulais en coulisse pour le faire rire, voire le déstabiliser. Pas facile !!! Un soir même, je lui montrais un livret, soit disant écrit par mon personnage, il y avait collé à l’intérieur toutes les meilleures photos de Rocco Siffredi, en action évidemment… Nous étions à Brest ce soir là. Je regardais la pièce se dérouler aux côtés de Charly Koubesserian, le maquilleur de Jean-Paul, lorsque ce dernier quitte soudainement le plateau et vient s’asseoir à côté de nous, laissant ainsi ses camarades dans la panade, improvisant à tout va. Il nous dit :   « Je ne sais pas ce que j’ai ce soir, je suis épuisé »   Avec Charly, nous rions, habitués à ses farces, et nous le poussons sur scène. Soulagement des copains qui reprennent le cours du spectacle. Quelques minutes plus tard, Jean-Paul sort à nouveau de scène, se pose sur la chaise, et là, on se rend compte qu’il ne plaisante pas. Il a le teint défait, il est même très pâle. Branle bas de combat ! on baisse le rideau sous les applaudissements du public qui pense que c’est une fin d’acte. Un comédien se charge de s’adresser aux spectateurs :   « Nous sommes obligés d’interrompre la représentation, monsieur Belmondo ayant eu un petit malaise, il y a t-il un médecin dans la salle ? »   La salle est écroulée de rire, trois personnes se lèvent, montent sur le plateau, persuadées qu’elles sont piégées par l’émission « Surprises sur prise ». Jean-Paul est allongé à cour sur un canapé, ses longs cheveux blancs pendent, il râle, ce qui est bon signe, il se sent mieux et veut reprendre le cours de la représentation. Les trois médecins perdent vite leur envie de rire et comprennent que la réalité vient de dépasser la fiction. Le Samu arrive, un ballet de médecins s’affairent sur Jean-Paul. La lumière est irréelle, les comédiens sont silencieux, l’ambiance est bizarre, un médecin lit la bande de l’électrocardiogramme et annonce que ce n’est pas cardiaque, on lui a mis un masque à oxygène. Natty, sa femme, est derrière lui, elle tient le chien dans ses bras et le caresse comme pour se rassurer puis passe la main dans les cheveux de Jean-Paul. Je ne peux m’empêcher de me dire qu’elle risque à force de confondre les deux… Les médecins, malgré l’insistance de Jean-Paul à vouloir reprendre le spectacle, lui annoncent son départ pour l’hôpital afin de faire des examens complémentaires. Il ne veut pas, il tient à reprendre le spectacle. Natty lui fait comprendre que c’est hors de question. J’en profite pour me rapprocher de lui et lui dire :   « Je suis désolé de t’avoir montré ces photos pornographiques, si j’avais su que ça te mettrait dans cet état… »   Il glousse, enlève son masque et dit :   « Enlevez-moi Crémadès sinon je vais vraiment faire une crise cardiaque… »   La suite est palpitante !   « A tout bientôt !!!

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