Magazine Journal intime

B.F.M ou Bracelet de Force Mag.

Publié le 17 janvier 2008 par Evin

Bracelet de Force Mag. Mais qu’est-ce donc que ça ? (Ev’, t’as encore fumé tes cheveux hein?) Ben justement non. Attends, je te raconte.

Tout a commencé en 1994, à la grande époque du lycée: premières grèves, premiers flirts, premiers verres (humm le Pisang Ambon au jus de pomme, slurp!), premières soirées sous fonds sonores de Rage Against the Machine qui nous détraquait les cervicales, les 2 Unlimited à fond dans la piaule qui nous donnait droit à des “baisse le son !!!” provenant de la cuisine du rez de chaussée, Doc et Difool le soir sur Fun Radio, premiers signes d’acné féroce, cette sensation que le monde nous appartient, on se sent touché et révolté par tout ce qui se passe et parallèlement à ça on en a rien à foutre de rien, enfin vous avez certainement dû vivre ça aussi, la période lycée ou plutôt tout bêtement l’adolescence...

Bref, mon lycée, dans lequel allait aussi mon frangin, c’était le lycée Jean-Moulin, situé tout en haut d’une côte interminable qui donnait chaque jour du fil à retordre à tous les bus environnants et surtout aux pauvres élèves qui venaient à pieds.

Dans l’enceinte de ce lycée avait été crée un journal, le fameux et « légal » journal du lycée, tenu par une équipe de rédacteurs tous surnommés les Scritch (pour ceux qui connaissent Sauvés par le gong), vous savez l’équipe de bons élèves, ceux dont les verres à lunettes ressemblent à des culs de bouteilles, ceux qui se retrouvent seuls en cours lors des journées nationales de grève, ceux qui n’ont pas d’amis ou en tous cas pas du genre humain, ceux dont les blagues ne font pas rire, ceux qui sont dans un autre monde, journal donc chiantissime à lire mais qui faisait néanmoins la joie et la fierté de Môdame la directrice (dont j’ai oublié le nom) ainsi que des professeurs.

Un jour de ce début d’année scolaire 94, un mec du lycée prénommé Arnaud, personnage haut en couleur que je connais depuis la maternelle (houla c'est vieux!), vient voir mon frère et lui fait une proposition de collaboration. Il a un projet, une idée terrible, mais ne pense pas pouvoir la concrétiser tout seul. Il s’agit en fait de publier un journal non officiel, un journal qui dérange, sans tabous ni censure, vulgaire voir trash, décalé, drôle et original, bref, un journal libre de jeunes libres. Mon frère est emballé par l’idée et comme il possède un ordinateur et une imprimante, sa chambre se transforma vite en imprimerie. Il ne manquait plus qu’à recruter une équipe de rédacteurs, peaufiner l’organisation, la distribution et le tour était joué.

Des rédacteurs à la plume acérée, vive et piquante furent très vite trouvés et cerise sur le gâteau, on avait même dégoté un dessinateur carrément doué qui s’occupait de la page de présentation et qui gratifiait le journal de BD acides.

Le nom de ce journal ? B.F.M : Bracelet de Force Mag, en hommage à un ancien du bahut, JPL, connu de tout le patelin cela va sans dire.

Son prix? 4 francs.

Et ça a marché !

Contre toute attente, le premier exemplaire de B.F.M s’est vendu tellement vite qu’on n’avait pas prévu assez d’exemplaires. Il a fallut rapidement passer au second volet de la série. Du coup, le prix du journal fut augmenté à 5 francs ! On le voyait partout, tout le monde se le refilait ; pendant les cours, dans les couloirs, à la bibliothèque, à la cafét’, dans le bus, partout on en parlait à voix basse, les gens se demandaient mais qui sont-ils ? Comment ont-ils osé ?! C’était énorme. Comme tous les rédacteurs avaient des pseudonymes, et que tous se gardaient bien de révéler qu’ils écrivaient dans le journal, le mystère planait sur ce canard et c’était vraiment jouissif.

Il y a eut en tout 5 numéros de B.F.M. Pas un de plus malheureusement. Il avait tellement fait parler de lui qu’il avait fini par atterrir sur le bureau de la directrice, qui, vous vous en doutez, n’avait pas du tout apprécié. Une véritable enquête s’était alors déployée, à savoir QUI était à l’origine de ce journal, QUI avait osé distribuer de telles horreurs aux pauvres lycéens sages, prudes et innocents ?!

Arnaud fut rapidement chopé car il avait commis une erreur dans son parcours de rédacteur en chef. Une seule erreur. Il avait signé le premier édito du premier exemplaire de son vrai nom. Il fut donc convoqué dans le bureau de la direction. On se disait tous qu’il était proche du renvoi, qu’il avait risqué gros, qu'il allait morfler, mais ce ne fut pas le cas. Môdame la directrice (caricaturée en position délicate sur la première page du numéro 3 …) s’était contentée de le sermonner et de lui interdire de poursuivre l’édition de son journal, mais surtout le comble, lui avait carrément proposé d’écrire dans le journal officiel du lycée ! Proposition qu’il avait refusée, bien évidement. Comme quoi hein …

C’en fut fini de B.F.M.

L’histoire ne dit pas ce que ce sont devenus les rédacteurs (ni même si j'en faisais partie, hin hin hin), mais ils doivent, tout comme mon frère et moi, ainsi que tous les lecteurs assidus, garder un souvenir impérissable de cette époque et peut-être même avoir gardé quelques exemplaires mythiques de B.F.M. J’en ai d’ailleurs retrouvé deux, deux rescapés, le numéro 1 et le numéro 3. Je ne vous cache pas que j’aimerais bien récupérer un jour les numéros manquants …

Récemment, à l'occasion d'un mail du site Copainsdavant.com, je suis tombée sur Arnaud qui venait fraîchement de s'y inscrire. Ni une ni deux, je lui envoyai un petit message lui disant qu'il me restait quelques exemplaires de son fameux canard. Sa réponse ne se fut pas attendre: lui n'en possède plus et le regrette vivement. S'il me le demande, je pourrais bien lui en faire quelques photocopies ...

Ne possédant pas de scanner, je ne peux pas vous faire profiter de quelques pages de ce journal plutôt salé, mais qui sait, peut-être qu’un jour, à l’occasion …

Cette note avait été rédigée sur feu le blog Fingerin Zenoz, blog collectif qu'avait crée MeZ. Je vous en fais (ou refais) profiter.


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