Il y a deux mois, le centenaire de la mort de Léon Tolstoï passait quasiment inaperçu dans son propre pays. Récupéré par les Soviétiques, excommunié par l’Eglise Orthodoxe, le père d’Anna Karénine peinerait-il à s’émanciper des interprétations biaisées ?
Admiré par Lénine, Tolstoï était considéré comme «le miroir de la Révolution russe». Autant dire que les Soviétiques ignorèrent l’un des axes majeurs de la pensée tolstoïenne : le refus de toutes formes de violence. Le même contresens amena l’Église à condamner son œuvre, perturbée par sa capacité à remettre en cause certaines de ses valeurs fondamentales. Que Tolstoï fut croyant et pacifiste ne changea rien à cette réception binaire et inexacte.
Loin de ces passions suscitées au début du siècle, l’œuvre de Tolstoï est aujourd’hui tombée, tout du moins en Russie, dans le champ neutre de l’indifférence. Alors que les 150 ans de la naissance de Tchekhov ont été célébrés en grandes pompes il y un an, le centenaire de la mort de Tolstoï n’a pas provoqué pas les réactions espérées par son arrière-arrière-petit-fils. Dans le New York Times, le descendant de Tolstoï se désole de ce rendez-vous manqué. Preuve, selon lui, que les autorités russes ne sont pas «suffisamment intelligentes» pour envisager «d’adapter» l’auteur à leur besoin.
La réhabilitation et la promotion de l’œuvre de Tolstoï peuvent cependant désormais compter sur les efforts de l’ancien homme d’état Sergueï Stepachine, qui s’est récemment engagé pour qu’un jour le romancier soit aussi admiré en Russie qu’il l’est à l’étranger. Il a ainsi contacté l’église orthodoxe pour qu’elle revienne sur son excommunication. Celles-ci a refusé, concédant aux fidèles le droit de prier pour le défunt centenaire. Mais à titre individuel…
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