Qu’y puis-je ? Je ne peux me détacher de cette tragédie.
Cette voix entendue à la radio m’obsède. Elle suppliait ces fanatiques d’épargner l’homme qu’elle aimait, qu’elle aime. « Pas lui », disait-elle. Depuis hier, on entend nos politiciens de tous bords condamner le terrorisme aveugle, justifier le recours à la force qui a emporté ceux qui sont devenus mes frères. Ai-je entendu une voix, ai-je lu une phrase pour elle ? Personne ne semble penser à cette femme. On dit que le ministre de la défense va se rendre à Niamey, j’espère qu’il aura la décence et le courage d’aller lui dire que la France, que la nation française partage sa douleur.
Oui, elle aussi est maintenant ma sœur.
Et puis la colère me gagne. La colère parce que je me dis que peut-être, ces deux là n’ont pas été choisis au hasard, qu’au contraire ils sont le symbole qu’il faut abattre. Car pour ces fanatiques, et pour ceux qui les manipulent en picorant dans des textes religieux, le pire ennemi est certainement celui qui refuse les barrières entre les peuples, celui qui donne son amour sans s’arrêter aux apparentes différences. Rassurez vous, nationalistes haineux de tous bords, les enfants qu’ils n’auront pas ne seront pas cette tache sur votre pureté de la race.
Des jeunes hommes sont morts pour avoir cru que le monde est libre, que chacun peut choisir où et avec qui il va vivre. Des parents sont effondrés. Des amis pleurent. Une femme est seule.
Sa voix est là. « Pas lui ».