Dans cette série de tests savoureux, nous partons à la découverte des menus originaux dans des lieux accueillants où qualité et prix s'accordent au mieux.
Visite en vidéo avec les Chefs qui présentent les plats
Le Credo de Garault
La grande cuisine c'est un peu comme la bourse. Une grande sauce, une préparation subtile, c'est volatil comme un titre dans la tourmente. Et pour conquérir les sommets de la gastronomie, comme pour surperformer un portefeuille d'actions, il faut respecter les fondamentaux. C'est ce qu'a toujours prôné Joël Garault et qu'il continue de défendre bec et ongles, contre vents et marée. Car la brise du n'importe quoi cherche à souffler sur la cuisine française. Est-ce parce qu'il faut se démarquer à tout prix, pour acquérir une renommée qui risque d'être éphémère, ou acquérir comme le prédisait Warhol un petit quart d'heure de gloire comme tout un chacun, quitte à le payer ensuite par des années de purgatoire... En tout cas certains se taillent une renommée à coup de trompettes assourdissantes et délaissent la mélodie pour le coup d'éclat qui risque bien de n’être que passager.
Chez Joël Garault rien de tout cela, bien au contraire. Témoin la carte qu'il a concocté pour l'hiver 2010/2011, à la découverte de la truffe noire, joyau sobre et délicat présenté dans l’écrin crème du restaurant qui la met en valeur - sans oublier les desserts de saison et surtout la spécialité de la maison, le soufflé, d'une légèreté exquise.
Le Vistamar a mué : un nouveau chef de la restauration Frédéric Duverger, qui a fait ses classes à l’hôtel Scribe à Paris et au 1835 de Cannes a fait son entrée il y a une semaine. Au mois de mars on ouvrira la nouvelle salle Eiffel en sus des quelques 80 couverts dressés aujourd’hui. La décoration a été entièrement repensée et rénovée. Prochainement toute la vaisselle sera renouvelée. Les assiettes avec leur liseré de poissons rappelleront qu’on est à quelques encablures seulement de la plus splendide mer du monde. Et le personnel se glissera dans de nouveaux costumes, beiges et marron clair, dans les tonalités chaudes et douces de ce de havre qu’est devenue la salle de restaurant amirale de l’Hermitage.
En ce qui concerne l’offre culinaire de Joël Garault, cherchez l’aberration du côté du firmament. La constellation de l’Hermitage regroupe cinq étoiles. Le Vistamar n’en a plus. Nous n’avons pas calculé l’ellipse des parcours de l’un et de l’autre, mais on s’étonne d’une évidente faute de calcul chez ceux qui lui ont soufflé sa chandelle et mis son étoile sous le boisseau. Alors Garault, même s’il se défend d’en faire une étoile du berger qui guide ses pas coûte que coûte, travaille à la reconquista. Et qui ne verrai pas un quasi quasar qui nous attire irrésistiblement, dans cette truffe noire à l’œuf mollet crémeux et croquant de pain ?
Garault prend tous les risques même celui de faire découvrir des produits dits oubliés. Il faut dire que les générations passent et que les références meurent avec les disparus. Car comment faire admettre aux octogénaires d'aujourd'hui qu'il y a des saveurs subtiles dans le topinambour ou dans le rutabaga, trop chargés dans leurs mémoire de l'odeur des restrictions et des années noires de la guerre? Les plus jeunes de leur côté n’ont cure de ces fumets du siècle dernier et auront l'esprit et les papilles plus ouverts. Place donc dans les entrées à ces légumes et fruits d’hiver servis tièdes et relevés d’un condiment artichaut et citron confit. Place encore dans les "incontournables" de la carte, au tronçon de turbot rôti à l’arête, accompagné de sa barrette de pois chiches, mousseline de pois cassés et billes de carotte. Ou à la canette fermière, cuisse braisée lentement et poitrine rôtie au miel d’agrumes et sa Tatin de navets... On pourrait multiplier les exemples à l'envi sans refréner l’envie de déguster les desserts et le sublime soufflé à la mandarine, marmelade et sorbet, ou le Manjari 64% de cacao, un palet fondant au chocolat de Madagascar et son sorbet à la mandarine de pays: Menton pousse ici un peu sa corne. Les prix? Encourageants: 15 € la truffe, 21 € les légumes, 48 € le turbo et la canette, et les desserts à 16 €.
L’axiome de la philosophie Garault part d'un constat: celui d'une cuisine et de ses tenants qui a correspondu pendant toute une nouvelle génération à son époque de zapping. Celle qui a réussi à faire croire à ceux qui voulaient rentrer dans ce qui reste fondamentalement un sacerdoce, qu'il n'y avait plus d'effort à faire pour réussir, ces arrogants qui ont voulu tout, tout de suite, et en ont oublié le respect du travail, pour glisser vers l'oubli du respect des produits, malmenés par des apparentements terribles dans la casserole aussi bien (ou aussi mal?) que dans l'assiette. C’est à l’opposé du credo de Joël Garault. Et nous n’avons jamais cessé d’avoir le plaisir d’assister à son office… Autres articles avec des tags similaires
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TASTY TESTS
(Les notes reflètent la moyenne donnée sur 20)
Originalité et créativité / Présentation / Goût :
Œufs brouillés à la truffe
15 / 14 / 16
Légumes et fruits d’hiver
16 / 14 / 14
Turbot rôti à l’arête
14 / 13 / 16
Canette fermière
14 / 14 / 15
Soufflé aux mandarines
16 / 14 / 17
Manjari 64% cacao
15 / 16 / 15
Le Vistamar
Hôtel Hermitage
Square Beaumarchais
Principauté de Monaco
Tel : +377 98 06 40 00 - Fax : +377 98 06 59 70
www.montecarloresort.com
Eva Esztergar, Noël Fantoni, le 16/01/2011