Magazine Talents

L’art de copier et d’être original

Publié le 27 janvier 2011 par Paumadou

Il y a quelques jours, j’évoquais un film de Mike Leigh, dans lequel il y avait quelques scènes très bien construites visuellement.

S’il est une chose à laquelle je suis très sensible dans les films, c’est ce qu’on appelle la photographie : en gros le cadrage et la composition d’une image. Parce qu’il ne suffit pas de poser sa caméra et de filmer des personnages qui s’agitent ! Non, pour qu’un film soit une véritable OEUVRE D’ART (le 7ème je vous rappelle ;) ), il faut notamment qu’il soit esthétique. Sinon, c’est juste une histoire, une satire ou un reportage. Pas de l’art.

Je reviens sur un film que j’ai vu il y a quelques mois : Copie Conforme d’Abbas Kiarostami.

L’art de copier et d’être original

Car s’il y a un film qui montre bien TOUS les aspects que peut revêtir le septième art c’est bien celui-là.

D’abord l’histoire : une histoire d’amour. Un peu étrange, mais ça reste de l’amour. Une histoire donc, avec un traitement renouvelé : est-ce un vrai couple ou non ? Se connaissent-ils vraiment ou non ? On ne le saura pas.

Une réflexion plus poussée qui porte cette relation ambiguë au-delà de la simple romance. Le sujet est là : la différence entre l’original et la copie ! Lui et elle, ont-ils eu une relation ou pas ? Feignent-ils la dispute ? Si oui, pourquoi se prennent-ils au jeu de cette « copie » de dispute, sinon si la dispute est vraie, pourquoi feignent-ils de ne pas se connaître ? Ca donne à réfléchir, à s’interroger.

Toute personne qui a étudié l’art d’un peu plus près le sait : la copie n’est jamais conforme et surtout, si l’orignal disparaît, la copie DEVIENT l’original.
C’est là que l’on s’embrouille pour eux : essayent-ils de recréer une relation qui n’existe plus ? Entre eux, avec quelqu’un d’autre ? S’agit-il de la relation elle-même qui existe encore ? Et pourquoi dans ce cas, ont-ils des rapports si conflictuels, pervers… (et que j’arrêterai, c’est pas le sujet de cet article !)

Deuxième point, c’est le son : pas de musique de fond, juste la musique de rue. Les gens qui parlent, les fontaines qui coulent, le vent, les cloches (beaucoup)… Comme quoi un bon film peut être très bien construit d’un point de vue sonore SANS musique, rien qu’avec la musique de la vie.

Et des langues ! Parce qu’on passe du français à l’anglais, en passant par l’italien, comme si tout ça était naturel. Comme les personnages eux-même passent facilement d’une langue à l’autre. (vive les sous-titres parce que c’est une sacrée gymnastique cérébrale, surtout pour l’italien que je maîtrise vraiment pas suffisamment)

Autre aspect, le visuel : Un film, c’est une histoire, du son et des images. Des images surtout ! Et là, Kiarostami joue à nous perdre entre l’original et la copie par une multitude de jeu de reflets, de regards, de fenêtres, de portes de vitres. Comme des tableaux mouvants… L’image qu’on a n’est pas le déroulement de la scène qui est hors-cadre, mais bien là par le reflet, par le son aussi… Et on se perd (le reflet, ce n’est pas la scène, c’est son double…)

Un véritable petit bijou donc que ce film. Parce que quand on en sort, on se pose des questions. Pleins ! Et jamais on n’aura de réponses. Il y a autant d’indices qui invitent à croire qu’ils jouent ou qu’ils disent la vérité. Parce qu’on a qu’une envie c’est de le revoir pour arriver à voir tous les détails, les cadrages, les mises en abîmes… Parce que c’est un excellent film qui sort vraiment de l’ordinaire, qui nous rappelle que le cinéma n’est pas qu’une histoire pour vous distraire, mais un art à part entière !


Retour à La Une de Logo Paperblog

Magazine