Poésie du dimanche - Parny II

Publié le 03 février 2011 par Ckankonvaou

Je vous propose une série de petits poèmes composés par PARNY (1753-1814)qui se suivent, mais vous pouvez quand même les lires indépendemment.En les lisant, j'ai tout de suite pensée à Sade et sa "Justine", j'ai vérifié les dates qui correspondent puisque Sade a vécu de 1740 à 1814, Parny et Sade sont donc complètement contemporains. Si quelqu'un a des tuyaux je prend. 

TABLEAU III
LE SONGE
Le sommeil a touché ses yeux ;Sous des pavots délicieuxIls se ferment, et son cœur veille,A l’erreur ses sens sont livrés.Sur son visage par degrés

La rose devient plus vermeille ;Sa main semble éloigner quelqu’un.Sur le duvet elle s’agite ;
Son sein impatient palpite, Et repousse un voile importun,Enfin, plus calme et plus paisible.Elle retombe mollement ;
Et de sa bouche lentementS’échappe un murmure insensible.Ce murmure plein de douceur
Ressemble au souffle de zéphyre,Quand il passe de fleur en fleur ;C’est la volupté qui soupire.Oui ce sont les gémissemensD’une vierge de quatorze ans,Qui ans un songe involontaireVoit une bouche téméraireEffleurer ses appas naissans,Et qui dans ses bras caressansPresse un époux imaginaire.
Le sommeil doit être charmant,Justine, avec un tel mensonge ;Mais plus heureux que l’amantQui peut causer pareil songe !
TABLEAU IV
LE SEIN
Justine reçoit son amiDans un cabinet solitaire. Sans doute il sera téméraire ?Oui, mais seulement à demi :On jouit alors qu’on diffère.Il voit, il compte mille appas,
Et Justine était sans alarmes :
Son ignorance ne sait pasA quoi serviront tant de charmes.Il soupire et lui tend les bras ;Elle y vole avec confiance ;Simple encore et sans prévoyance.Elle est aussi sans embarras,Modérant l’ardeur qui le presse,Valsin dévoile avec lenteurUn sein dont l’aimable jeunesseVenait d’achever la rondeur.Sur des lis il y voit la rose ;Il en suit un léger contour ;Sa bouche avide s’y repose :Et l’échauffe de son amour.Et tout-à-coup sa main folâtreEnveloppe un globe charmant,Dont jamais les yeux d’un amantN’avaient même entrevu l’albâtre.
C’est ainsi qu’à la voluptéValsin préparait la beautéQui par lui se laissait conduire ;Il savait prendre un long détour.Heureus qui s’instruit en amour,Et plus heureux qui peut s’instruire !
Artiste : XiPan