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Bobbi

Publié le 04 février 2011 par Banalalban

Monsieur Aguirre appela les ascenseurs et m’expliqua qu’il suffisait d’humecter les boutons d’appel pour que les élévateurs arrivent. Il me précisa que pour l’instant ma salive n’avait pas encore été encodée mais que ce serait fait le lendemain. Je m’inquiétais de la fiabilité d’une telle technologie mais il me rassura en évoquant le triple système de sécurité qui prenait automatiquement le relais de tout ce qui était électrique au 30, rue Saint Fiacre.

Il me désigna une lourde porte à la droite de l’ascenseur qui venait de s’ouvrir sous son appel « humide ».

« _ Derrière, il y a un champ de bobos de toute dernière génération… Vous êtes sensibilisée à leur utilisation ?

_ Euh, je dois bien avouer que je suis plutôt contre leur exploitation…

_ Ah, nous avons donc affaire à une partisane de l’anti-libéralisme… je me suis toujours demandé comment vous pouviez être contre l’utilisation de ces coléoptères alors qu’ils réduisent de manière plus que considérable la mise en place d'energies polluantes...

_ Et bien disons que je trouve pour ma part que l’exploitation d’êtres vivants ne vaut finalement pas mieux que l’utilisation d’énergies polluantes…

_ Convenons alors qu’il s’agit d’un moindre mal…

_ Si vous voulez… ».

Je me souviens enfant des champs de bobos qui s'étendaient à perte de vue aux sorties de village, du cri des insectes lorsqu'ils étaient battus pour produire la lumière de la grande ville entière. Même maintenant et malgré l'habitude, ça me glace le sang.

C’est un Ephemère qui nous accueillit dans l’ascenseur et qui nous demanda notre destination. Monsieur Aguirre annonça le numéro d’étage, le six-cent quatorzième, et l’Ephémère se hâta de composer le numéro d’étage sur la console avec son long doigt mollusque 5.

Les portes de l’ascenseur se refermèrent, les parois se reculèrent alors sensiblement et nous fûmes entourés d’une matière visqueuse mais non collante qui se mit à sortir de la bouche de l’Ephémère à une vitesse ahurissante tant et si bien que nous nous retrouvâmes coincés dans une sorte de cocon glaireux. Monsieur Aguirre m’expliqua en communiquant avec moi de manière télépathe que c’était une mesure de sécurité secrétée par l’Ephemère (Bobbi) pour prévenir tout accident. Un autre Ephemère, de petite taille (environ une vingtaine de centimètre, Bobbi II) et qui était emprisonné dans une cage minuscule pareille à celle des Oiseaux-réduits, égrena en hurlant le numéro des étages que nous dépassions 1-2-3-4-5...

« _ Nanotechnologie… commenta monsieur Aguirre avec un sourire complice. »

L'utilisation d'Ephémère nains tout comme celle des bobos m'a toujours exaspérée...

Arrivés au six-cent quatorzième étage, Bobbi se mit à aspirer toutes ses sécrétions en émettant un bruit d’aspirateur avec la bouche, nous délivrant ainsi de notre gangue protectrice, et Bobbi II déclara un " vous êtes arrivés" très courtois. Je fut surprise, une fois les pieds à terre, du caractère extrêmement onctueux du mucus sécrété par l’Ephemère.

« _ Cela a été mis en place après que les Scientifiques aient pris conscience de la conductivité de l’ancienne protection. De plus, celle-ci, de toute dernière génération, est non tâchante… et parfumée… vous n’avez pas goûté ?

_ Non, on m’a toujours dit qu’il ne fallait pas en manger…

_ TADA !!! Ici, ce n’est plus le cas… bienvenue dans le futur… »

Je goûtais : c'était effectivement très bon et rappelais les bibobles que me faisait ma grand-mère.

Nous arrivâmes bientôt sur ce qui allait bientôt devenir mon nouveau palier.

Sur le sol, écrit en lettres lumineuses, "Bienvenue Madame"…

J’entrais chez moi, heureuse…

J'appuyais sur l'interrupteur : un bobo se mit en marche en crépitant des élytres et dispensa sa lumière douceâtre...


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