Le Parlement vient d’adopter la Loi de finances pour 2011. Sa lecture reste un exercice des plus difficiles, mêlant endurance et résistance. Pour en saisir toute la substantifique moelle, il faut non seulement être sportif et disposer d’un cursus universitaire long comme le bottin, mais aussi résister au sommeil. Pour ma part, armé de mon Bac+0, donc avec un sérieux handicap, il a réussi à m’endormir plus rapidement qu’une cuillère de sirop antitussif.
Et pourtant, il y a bien des choses à apprendre dans ce charabia juridique, notamment que l’imposition des petites gens va encore augmenter. Peut-être un jour, je reviendrai sur ce point. Pour l’heure, je vais m’abstenir, car si je devais écrire quelque chose pour chaque promesse électorale non tenue, j’y passerais toutes mes nuits et mes jours, jusqu’à en perdre l’usage de la main…
Dans l’immédiat, ce qui a retenu mon attention, c’est la remise en cause d’une niche fiscale consistant en un crédit d’impôt pour les exploitations agricoles converties aux productions biologiques. C’est même un sacré coup de rabot : en un voyage, le copeau enlevé réduit de moitié une mesure mise en place par le fameux «Grenelle de l’environnement». Cela devait permettre de faire passer de 2 à 20% des surfaces agicoles la part cultivée en bio à l’échéance 2020. «Il faut l’aplomb du ministre de l’Agriculture pour oser dire qu’il défend les petites exploitations !», a déclaré le porte-parole de la Confédération paysanne. «Le crédit d’impôt était forfaitaire, qu’on ait 4 ou 100 hectares on pouvait recevoir jusqu’à 4 000 euros, donc c’était favorable aux petits». Pour la petite histoire, l’économie réalisée de la sorte est de 16 millions d’euros, soit moins d’un dizième du coût du nouvel A330 présidentiel… Une paille.La mesure a le mérite d’être limpide. C’est un parfait contrepet (pied…
) fait au Grenelle de l’environnement, cette espèce de fantôme flasque et mou, constitué au départ déjà essentiellement par du vent. Il a rempli son office : occuper un temps quelques ténors plus ou moins verts et l’opinion en lui donnant suffisamment de grain à moudre pour masquer je ne sais plus quel scandale ou passage à vide du nabot. Adieu donc, veau, vache, cochon, couvée. On continue avec la chimie, la pollution, le petrole, et la finance… Jusqu’à extinction.Les producteurs bio ne roulent pas sur l’or. Une reconversion coûte cher, très cher. Les prix, les rendements, le travail, tout est plus difficile, un vrai parcours de combattant, une réelle épreuve de volonté. J’en sais quelque chose pour les cotoyer toutes les semaines, sur les points de distribution de paniers de fruits et légumes en circuit court. Que des produits de ferme, pas de l’industrie, élaborés avec conscience et respect de la nature. Malheureusement, dans ce domaine comme dans bien d’autres, on applique le filtre libéral en vigueur : on coupe les ailes aux petits, on subventionne grassement les gros (10 milliards pour les céréaliers).
Et là, on est très clairement dans le travailler plus, pour gagner moins…