Les hommes s’étaient divisés en deux catégories bien distinctes. La première était formée de ceux qui possédaient une bulle de protection les entourant comme un halo, ainsi à l’abri de toute maladie mais aussi des accidents et, pour plus de rentabilité, des sentiments. Invulnérables, personne n’avait de prise sur eux. Elitistes, ils ne parlaient qu’à ceux de leur « espèce ». Vaniteux, ils se pensaient pourvu de toutes qualités et d’une intelligence dépassant de loin la moyenne instaurée dans les temps anciens. De l’autre coté, ceux qui, nés dans une famille à maigre revenu, n’avaient pas les moyens de se procurer cette bulle vivaient dans la misère (et vivre est un bien grand mot), luttant chaque jour contre ces maladies, qui s'acharnaient, furieuses de ne plus avoir d'impact sur les "protégés", contre toutes les sortes d'accidents possibles et imaginables et, fatalement, contre la mort. Une marge instaurée par l’argent et les facilités qu’il procure dans ce monde où le capitalisme fut le tremplin de la légitimation de l’égoïsme pur et dur.
Tous les jours "les protégés" passaient devant la seconde catégorie en se hâtant. Pour rien au monde ils ne voulaient s’arrêter. Cela aurait tout bonnement équivalu à avouer l’existence honteuse de leur concitoyens qui, depuis bien longtemps, n’étaient plus considérés comme tels et faire preuve d’une incommensurable faiblesse. Ce qui était, bien sûr, totalement exclu pour des hommes comme eux.Pourtant… Ralentissons un peu et focalisons-nous sur cette bulle de protection…
Pourtant…Si ces hommes daignaient s’arrêter un instant, ils remarqueraient peut-être cette notion d'humanité qui les caractérise tous, autant qu’ils sont. Si leur bulle, si parfaite soit-elle, n’avait pas cette terrible imperfection de les protéger un peu trop, peut-être s'apercevraient-ils, comme nous en cet instant, que dans cette bulle il y a suffisamment de place…
Pour deux…