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D'or et de plomb

Publié le 13 février 2011 par Jlk

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Une lecture de La Divine Comédie (24)
L'Enfer. Chant XXIII. Hypocrites.
La lecture de la Commedia de Dante peut être d’une saisissante actualité, pour peu qu’on y mette du sien.
Par exemple, dans ce Canto XXIII, traitant du sort des hypocrites, le lecteur passif ne trouvera rien de bien saillant, tandis que celui qui le rapporte aux dernières nouvelles du monde en fera son miel.
Or, en le lisant et le relisant ces derniers temps, tout en suivant les événements survenus en Tunisie puis en Egypte, en prenant connaissance des dernières frasques du pantin lubrique d’Outremont ou en assistant aux démonstrations de vertu d’un de nos banquiers sans visage, il me semblait tremper en pleine hypocrisie éternelle et tout actuelle à la fois.
Avis aux amateurs : ça ne va pas être gai tous les jours dans les basses fosses affectées par le poète aux faux-culs, par lui condamnés à tourner lugubrement en rond sous un vêtement à l’image de leur double jeu puisque, du dehors, cela fait plutôt cape de chez Dior, genre pèlerin sévillan pailleté d’or fin, tandis que la doublure intérieure est de plomb pesant.
Or c’est un peu l’impression que m’a fait l’autre soir le pauvre Raïs égyptien en son dernier discours, tout pharaonesque d’apparence mais sonnant creux, le derme ciré et retendu sur sa vieille carcasse, le dehors tout brillant et le dedans trahi par son regard mort et son verbe suant le faux miel, trahissant illico l’arnaque à vue.
Je suis votre père aimant, martelait ainsi le Commandeur corrompu, tout ce qui est arrivé à nos martyrs sera vengé, osait assener l’ordonnateur même de la répression, sus à l'étranger: demain ce sera la fête où nous raserons gratis grâce à notre révolution que je comprends pour avoir été jeune moi aussi, et tout cela signifiait : trahison, ce que le peuple a compris sur-le-champ.
Les hypocrites d’Etat dont nous parle Dante dans ce chant nous sont un peu lointains, potentats supposés servir le bien public et se l’appropriant au contraire, comme on le voit aujourd’hui dans le monde mondialisé où rien n’a changé dans les grandes largeurs, mais l’appellation qu’il leur réserve, de « sépulcres blanchis », empruntée à l’évangéliste Matthieu, fait image et prend plus de sens si l’on se rappelle, précisément, la grimace sous le masque du potentat égyptien déchu, ou le rictus hideux du Séducteur rutilant qui déshonore la chère patrie du Florentin...
Quant au sépulcre blanchi à la manière helvète, nous l’aurons vu dans la figure policée de ce ponte de l’Union des Banques Immaculées justifiant récemment à la télé son salaire non moins pharaonique que celui de son client du Caire, et nous rassurant en nous assurant que tout Bonus n’est que la sanction de la plus haute compétence reconnue selon les Lois du Marché, que tel est le prix de la crédibilité et que de toute façon tout cet argent ne lui revient pas pour son plaisir mais pour travailler, comprenez-vous Monsieur: mon argent travaille, lui, ce n’est pas comme celui des pauvres, mais ce n’est pas pour autant de l’usure, que non pas, à quel terme inapproprié alliez-vous recourir, Monsieur, vous me peinez, ne comprenez-vous donc pas qu’il m’en coûte d’être si plein aux as ?


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