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Maternelle

Publié le 16 février 2011 par Yelyam
MaternelleSi je me remémore mes rêves de petite fille, j’ai toujours voulu avoir un bébé. Je dis bien un bébé. Pas un enfant.
Je me rêvais plus grande et enceinte. J’étais fascinée par les ventres ronds que je croisais parfois.
Puis j’imaginais l’arrivée du bébé. Je jouais à la poupée. Elles devaient obligatoirement représenter des bébés. Je détestais les poupées ressemblant à des enfants. Rien d’inquiétant aux yeux des adultes autour de moi : je voulais jouer à la maman. Comment imaginer être la maman d’une poupée qui avait l’air d’avoir mon âge ?

J’ai porté ce rêve en moi durant de longues années. Jusqu’à ce que ce soit toi en moi. Je n’avais plus besoin de rêver… tu poussais dans mon ventre. Je te sentais bouger, même au tout premier temps de ma grossesse. Cela faisait vingt-neuf ans que je te rêvais et tu étais enfin là, encore à l’intérieur de moi, mais déjà matérialisée, avec une existence, et d’autres que moi commençant à s’intéresser à toi. Toi dans mon ventre, je n’étais plus seule dans mon corps. Toi dans mon ventre, je n’étais plus seule à te rêver.

Puis ta naissance. Les cris, le sang, la peur, les frissons, la joie, les larmes, les ravissements, les inquiétudes, les émotions.
Et surtout toi.
Toi malgré tout. Toi par-dessus tout.
Toi devant moi, me regardant. Toi sur moi, me relaxant. Toi sur mes seins, m’énergisant.
Et bien sûr moi. Moi finalement dans le rôle de ma vie.
Moi près de toi, t’aimant. Moi autour de toi, te protégeant. Moi sous toi, te nourrissant.

Et nous, ensemble. Tout le temps.

Les premiers temps, cette fusion de nous deux n’inquiétait personne. Une mère et son enfant…
Avec les mois qui passaient, d’autres ont voulu un peu t’accaparer : ton père, tes grands-parents, et bien d’autres…. cela a commencé à les inquiéter de nous voir si attachées l’une à l’autre. Ton père me disait pourtant de te lâcher un peu, de me détacher… Il était bien dans son rôle de papa. Aider son enfant à quitter les jupes de sa mère… Je ne lui en veux pas. Il ne savait pas. Moi non plus, je ne savais pas à ce moment-là.

Ce n’est que maintenant que je comprends toute l’énergie que je mettais à rester près de toi. L’énergie du désespoir. L’énergie de la mourante qui donne tout l’amour qu’elle a parce que le temps lui est compté.

J’espère t’avoir nourrie suffisamment pour toutes ces années où je ne te verrai pas grandir….


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