- Hé, Kadeur !
Je me retourne. Devant moi, il y a un grand mec dégingandé, vêtu d’un improbable pyjama noir, moustache fine, les oreilles cloutées et la gueule de travers. Je ne le reconnais pas tout de suite et puis :
- Zob, zob ! Francis, incroyable ! Je ne t’aurais jamais reconnu !
- Eh oui, tu vois, il y a un avenir après le punk à chien !
- Waouh, t’es trop beau ! Qu’est-ce que tu fous ici ?
- Ben, je travaille ! Chez Yamamoto, un japonais fou.
Je ne peux m’empêcher de rire.
- Dis donc, t’as viré de camp total ! T’es passé du côté obscur ? Vive la consommation et le capital désormais ?
- Eh oui, fini le choc, bonjour le chic ! Fous-toi de ma gueule mais qu’est-ce que tu viens traîner tes guêtres ?
- Je cherche une fille.
- Ah, ah, tu n’as pas changé, mec !
- Non, ce n’est pas ce que tu crois. Une vendeuse, une certaine Louise. Tu sais quelle est son rayon ?
- Oui, fellation et levrette.
Francis a toujours été un peu lourd.
- Arrête, c’est sérieux. Je ne suis pas venu pour ça.
- Oui, oui, c’est ce qu’ils disent tous…
Son clin d’œil trop appuyé me donne soudain l’impression de poursuivre la plus grande nymphomane de Paris.
- Je m’en fous. C’est une question de vie ou de mort !
- T’es vraiment accroc ?
- Et toi, con. Alors, où est-elle ?
- Hé, t’énerve pas mec, elle est au premier étage, à droite de l’escalator. Au rayon des parfums. Chez Triptyque.
- Merci, on se rappelle, mec.
J’ai la tête un peu confuse par toutes ces infos. Je doute de plus en plus de qui je poursuis : une boxeuse nymphomane ? Une chienne enragée ? Ou la douce femme enceinte que j’ai rencontrée il y a cinq jours ? Et je ne suis pas au bout de mes surprises…
Je me précipite vers l’escalator, direction Louise ! Je la vois, enfin, cachée là-bas, derrière son comptoir. Je m’approche. Avec surprise, je me rends compte que je fais trois têtes de plus qu’elle et… que son gros ventre a totalement disparu… Merde !