Cracheur
Janvier 2005. Palais de Tokyo, Paris
En 2004, Yoann Moulin fête son anniversaire. Comme tous les ans. Mais, cette année-là, familia et potos se lâchent. Toute la petite brochette de chômeurs qui lui sert d’entourage socio-affectif se serre la ceinture, bouffe des patates et des nouilles pendant quelques temps et se cotise. Le jour J, l’ami Yoyo se voit offrir un sympathique réflex numérique dont le tarif dépasse allègrement le SMIC en vigueur à l’époque.
Les premiers temps, comme tout frais possesseur d’appareil photo, Narcisse est dans la place. Ses pieds, ses mains, sa gueule. Tout y passe. Et, parfois, tard le soir, sous sa couette, éclairée par la lampe de chevet, sa zigounette lui sert de modèle.
Très vite, Narcisse se lasse. Alors il prend un sac à dos et fourre l’engin à l’intérieur. L’appareil, bien sûr. Et il sort. Dehors. Et il cherche.
Yoyo est un grand malade.
Quand on cherche, on commence souvent par regarder autour de soi. Dans le cas présent, des beatniks chevelus à l’hygiène douteuse. Des zazous du troisième millénaire. Jongleurs, cracheurs de feu et autres clowns mal habillés.
Ces oiseaux-là, quand ils dégueulent leur flamme, c’est quelque chose.
Exactement le genre de chose que cherche Yoann Moulin.
Rendre palpable ce qui ne l’est pas. Dessiner les contours de ce que l’oeil esquisse à peine.
Respect, Yoyo.