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Anecdotique

Publié le 01 mars 2011 par Addiction2010

Veux tu que je te dise ? Non, tu ne veux pas. Tu ne liras pas ce post, pas plus que tu ne liras la lettre que de toute façon je ne vais pas t’envoyer. Tu n’es pas Raphaëlle, tu es une autre, je t’aurais voulue en elle et tu aurais pu l’être, à quelques détails près. La barrière est ténue entre le sordide et le merveilleux, je pensais que nous l’avions dépassée. Me diras tu si je me suis tellement trompé ?

Je vais te dire pourtant ce que tu ne veux pas entendre, ni lire. Voilà des mois que je n’ai plus touché le corps d’une femme. Et encore, je n’ai pas ajouté « aimée ». Tu vois, aucune. Tu as été la dernière. Comprends moi, cela ne veut pas dire que tu seras toujours la dernière. Ah, si tu avais lu mes mots, tu saurais que souvent je me suis interrogé sur la dernière fois. La vie est faite de dernières fois, jusqu’à l’ultime, dernière respiration, dernier battement de cœur et, il me plait de l’espérer, dernière pensée. Je n’en suis qu’à évoquer des dernières caresses, et tant pis pour la petite mort. Sans doute, puisque la vieillesse ne m’a pas encore totalement rejoint, aurais-je un jour de nouveau envie de trouver ce que tu me donnais avec une autre puisque je sais bien qu’avec toi, cela ne sera plus.

Te rappelles-tu ce soir, à la fin d’un été qui ne fut pas celui qui s’annonçait, où tu m’as demandé de te masser. Tu avais une douleur dans la cuisse, disais-tu. Tu t’es couchée sur ton lit, tu t’es déshabillée, assez pour me présenter ta cuisse nue et me demander d’y poser mes mains pour libérer tes muscles noués, endoloris. Tu étais couchée sur ce lit où tant de fois nous nous étions retrouvés, mais cela faisait déjà longtemps que ce n’était plus qu’un souvenir. Ce soir là, je t’avais une nouvelle fois servi de chauffeur. Tu jouais avec moi, je m’en contentais. J’aurais pu te déposer et partir, tu m’avais invité à m’arrêter un peu, à boire un verre peut-être. Et tu parlais de cette douleur, tu m’as demandé de te masser. Certes, tu me cachais cette partie intime de ton corps qu’autrefois tu m’offrais, quand tu me disais de te baiser, mais je voyais ton ventre, et seul un bout de tissu blanc me séparait de cette chair qui souvent s’était fondue à la mienne. Oui, ce soir là mes doigts auraient pu, par accident, par jeu ou par désir, remonter le long de ta cuisse. J’ai préféré fuir, prétextant ma balourdise et le risque de te faire mal au lieu de te soulager. As-tu compris que ce que je fuyais, c’était le désir que la vue de ton corps éveillait en moi ?

Nous nous sommes encore vus quelques fois ensuite, tu m’as encore demandé de faire le taxi pour toi. Je suis entré chez toi, nous nous sommes assis l’un près de l’autre. Tes lèvres ont parfois touché les miennes mais plus jamais nous n’avons été si près de basculer. Je ne saurais jamais ce qui serait advenu ce soir là si j’avais eu plus de courage, comme je ne saurais jamais ce qui se serait passé un certain soir du mois d’août si une amie ne t’avais pas appelée, si tu ne lui avais pas proposé une certaine sauce préparée devant moi, goûtée avec moi aussi.

Il est probable que tu te contrefiches de tout cela. Je voudrais moi aussi l’avoir oublié, mais voilà que mars se rappelle à mon souvenir. Peut-être, si un hasard miraculeux te mène ici, comprendras tu quelle fête ce mois naissant ramène. Mais pourtant, c’est vrai, tu n’es pas Raphaëlle.


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