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Le pigeon de service

Publié le 01 mars 2011 par Cochondingue

Il avait la tête du brave gars. Le mec qui se présente chez toi et que t’invites à prendre le thé, même si en général tu ne bois pas de thé. Vraiment le chic type. Il inspirait confiance, cet enfoiré de faux agent EDF.

J’ai l’impression d’avoir été la grand-mère un peu sénile à qui on a refourgué 965 exemplaires de l’encyclopédie du joint de culasse, pavés dont elle se servira comme repose-pieds en regardant La roue de la fortune sur TF1, tandis qu’elle n’aura pas assez de toutes ses maigres économies pour rembourser le crédit qu’elle aura signé sans le savoir.

Le pire quand on se fait arnaquer, c’est le sentiment d’être le dernier des abrutis, de porter un écriteau dans le dos sur lequel tous les escrocs du coin peuvent lire : je suis le pigeon parfait.

Le faux technicien EDF m’a appelée aujourd’hui. Son entreprise venait de recevoir la lettre recommandée de notre avocat.
« Mais madame, je ne comprends pas, comment ça, je ne vous ai pas dit que je vous faisais signer un crédit de 13169€ à un taux exorbitant, en le faisant passer pour un formulaire totalement anodin ? Bien sûr que si, je vous avais prévenue. Tout était parfaitement clair»

Ouais, c’est ça, c’est moi qui ai mal compris. L’âge sûrement... A partir de 30 ans, le cerveau se délite, tout le monde sait ça. Vous m’avez tout bien expliqué et moi j’ai foncé droit dedans. Allez hop, un petit crédit de rien du tout. Allez hop, un prêt sur des années pour un chauffe-eau que je ne rentabiliserai jamais.

Et puis l’imitation de la signature de mon mari sur l’attestation de fin de travaux, c’est franchement pas mal. Dans les règles de l’art.
« Il s’agit d’un malentendu. Vous savez, je risque ma place si vous portez plainte ».

Après m’avoir dépouillée de mon blé, il a essayé de me soutirer des larmes. Mais s’il savait ce que j’en ferai des types comme lui, qui passent leurs journées à escroquer les vieux, les crédules, les confiants, les innocents, les personnes pures (comme moi)…
S’il savait comme je déteste qu’on me prenne pour le pigeon de service. Alors, d’un coup, comme ça, tout est sorti. Ma colère s’est déversée dans le combiné. Mais sans insulte, juste l’exposé clair, précis et tranchant des faits. Le type n’avait plus rien à dire. Juste à conclure :
« Il n’y a pas de problème madame, il n’y a que des solutions. Si vous voulez l’annulation de la commande, vous l’aurez ».

Première bataille gagnée en attendant l’assaut final.


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