Je me sens cernée. A la cantine, le midi, d’étranges pensionnaires se nourrissent exclusivement de tranches de jambon, d’œufs durs et de steaks hachés.
Lorsque je suis invitée à manger, chez mes parents, le soir, c’est épique. Ma mère ne consomme que des bâtonnets de surimi, et mon père, lui, ne mange rien, ou que de la soupe. Enfin, en ce moment. Ca suit immédiatement sa période « régime pâtes ». Avec un peu de chance, pour peu que ma sœur et son mari soit invités, lui au régime sans sel et elle au régime sans sucre (pour des raisons médicales, ceci dit, ils ont une bonne excuse), et mon frère qui ne peut pas manger de légumes, on sombre dans le grand n’importe quoi.
J’avoue que je fais aussi beaucoup attention à ce que je mange (et aussi, accessoirement, à ce que mon homme et les schtroumpfs mangent). Mais je fais surtout attention à manger de tout. Et j’abhorre le mot REGIME, dans le sens commun de restriction alimentaire.
Les bras m’en tombent. Comment peut-on imaginer, sur le long terme, non seulement maigrir mais être en bonne santé avec des régimes aussi déséquilibrés ?
Régime Dukan (Ducon, comme on l’appelle par chez moi), régime Mayo (et qui, contrairement à ce qu’on pourrait imaginer, ne consiste pas à se nourrir exclusivement de tartines de mayonnaise), régime dissocié, régime détox, ou n’importe quel soi-disant régime de star qui sera à la mode cette année. Parce qu’il y a des modes, là comme ailleurs.
Bien sûr, on maigrit. Vite. Accessoirement, on met aussi en danger sa santé, et on a de grandes chances de regrossir bien plus.
Dans des cas précis, ces régimes, sous contrôle médical, peuvent éventuellement être justifiés si les bénéfices pour la santé qu’ils apportent sont supérieurs aux risques (dans des cas d’obésité, donc, ayant des répercussions sur la santé).
Pour le reste, et même si parfois, j’aimerais pouvoir gommer 5 kilos en 1 mois comme le promettent les magazines féminins à partir du mois d’avril, je conserverai mon régime alimentaire à moi. Je mange de tout, mais surtout j’ai appris à écouter mon corps.
Ca tient en 3 mots. Ecouter mon corps. Et pourtant, ça m’a pris des années à réapprendre, des années durant lesquelles mon poids a varié autour de mon poids standard… Des années, aussi, de rapports parfois difficiles avec la nourriture. De fait, je ne sais pas si je peux dire que je serai toujours apaisée, sur ce sujet. Sans doute pas, sous la surface lisse, j’ai une fêlure qui ne demande qu’à se rouvrir un jour, un jour de blues, un jour d’idées noires.
Mais cela fait des années que j’ai enchaîné ces vieux démons, et leurs grondements ne me font pas peur.
Je mange à ma faim.
Je mange aussi, parfois, par gourmandise, ou par plaisir.
De moins en moins, je mange par ennui.
Plus jamais, je ne mange par compulsion.
J’ai réapprivoisé mes sensations d’appétit, de goût, de satiété…
Or cette relation au corps, qui me semble fondamentale, est complètement foulée au pieds par l’ensemble de ces régimes. Ils induisent un rapport malsain et totalement déséquilibré entre corps et nourriture.
A la vue de ces assiettes de « régime » (tout comme à la vue de plateaux remplis uniquement de féculents, de graisses et de sucres), j’ai du mal à rester impassible. Je détourne les yeux, parce qu’après tout, chacun fait ce qu’il veut. Mais je peste, intérieurement, contre ces médecins, ces éditeurs, ces journalistes, qui œuvrent soi-disant pour le bien de l’humanité (mais aussi, surtout de leur porte-monnaie).
Et je reste persuadée qu’aucun d’entre eux n’a suivi, au moins à long terme, l’un des régimes qu’ils prônent.
A bientôt mes petits clous !