Aujourd’hui dans ma tête, il y a…
...mon fils.
Celui qui n’est pas encore né (heureusement) mais qui vit déjà dans mon esprit. Celui que j’aimerais voir naître mais pas sur cette terre qu’ils auront anéantie. Car depuis que je suis né, j’assiste à sa dégénérescence. Pourtant, disent-ils, un jour, avant ma naissance, elle était dans le concert des nations.
Je suis un enfant des années 80. Celles qui ont été ni fastes, ni chastes ; la fin de la grande période de cette Côte d’Ivoire regrettée, le début d’une histoire désespérée. Né au milieu de cette décennie, j’ai à peine connu le père de la nation, celui dont tous se réclament aujourd’hui. Sa santé décadente donnait le ton à ce pays qu’il laisserait derrière lui. Mais cela, je ne le sais que de la bouche de mes parents. J’aurais voulu mieux le connaître, ce fils de Côte d’ivoire et ce père de la nation. Le rencontrer par ses œuvres et ne pas seulement se le faire raconter par des historiens de fortune. Ceux qui trahissent sa mémoire en racontant leur histoire. Son héritage en désuétude me dit tellement sur lui. Quelque soit l’homme qu’il était, sa vision est grande au regard des ces institutions qui ont fait mon éducation. J’aurais aimé mieux le connaître et grandir dans son pays où l’excellence était la règle.
En lieu et place, j’ai passé les années les plus importantes de ma construction personnelle à chercher des points d’ancrage dans la boue. Onze années d’hésitation, onze années de balbutiement, onze années de stagnation, onze années de division… Presque la moitié de ma petite vie.
Hier, ils nous promettaient un aujourd’hui meilleur. Le début d’une nouvelle vie, la fin de la crise. La ré-union, la fin de la bêtise. Tout ceci serait possible grâce à des élections. Alors, ce peuple bien crédule est allé voter en masse. Les enfants de la génération 80, longtemps privés de ce droit, ont fait entendre leur voix. Quant à moi, plus qu’un droit constitutionnel ou un devoir citoyen, je suis allé voter pour la paix, pour mon fils. Car je rêvais et continue de rêver d’autre chose pour lui. Pourtant, au lendemain de mon geste héroïque, tout ce que j’entends est :
« Tant pis pour ton fils, il n’est pas encore né
Nous, aujourd’hui, tout ce qu’on veut, c’est gouverner »