C'est en parcourant un blog tout simple et que j'aime bien que j'ai eu envie de remonter tout en haut de ch'terril...
Nous n'avions pas de montagnes, alors nous en avons construit. Nous, c'est vite dit. Ce sont plutôt nos ancêtres qui l'ont fait, et sans vraiment y penser. Et même quand je dis "nos ancêtres", c'est un peu exagéré car c'est du fond de la terre que sont venues nos montagnes, et ce sont les mineurs qui les ont extraites. Mes ancêtres à moi ont fait toutes sortes de métiers, dans les champs, dans les usines, sur les canaux, des métiers durs, mais on n'a pas souvenir d'un passage par la mine. Et pourtant, ce sont bien mes ancêtres qui les ont construites, ces montagnes.
Au départ, le terril, ce n'est qu'un gros tas d'ordure. Mais il fait tellement partie du paysage qu'on ne peut imaginer son absence. Bien sûr, certains ont disparu, on a construit des autoroutes avec... Mais quel nordiste, exilé à Paris ou ailleurs, se rendant dans le Nord par l'autoroute niera qu'il a un pincement au coeur quand soudain apparaisent les terrils ? Terrils, beffrois, et géants aussi sont nos vigies. Nous les voyons, ils nous voient aussi. Oui, ce sont de véritables personnages et j'imagine que les plus superstitieux d'entre nous sont certains qu'ils renferment quelque divinité d'un autre âge qu'il ne faut surtout pas oublier.
Ah, le terril de Noyelles. Je me souviens qu'on dominait la région de là haut. Bien sûr, c'était interdit. Je peux avouer aujourd'hui y être monté, il y a prescription. Et puis, franchement, si on devait jeter en prison tous ceux qui ont escaladé ces terrils quand c'était interdit, cela ferait du monde. C'est vrai que c'était un peu dangereux, mais enfin, nous en faisions d'autres...
Alors, qu'en reste-t-il aujourd'hui? Tant d'années ont passé, plus aucun terril ne reçoit plus les entrailles de la terre. Certains ont été reconvertis en lieux de détente, baptisés "bases de loisir", on a même construit une piste de ski sur l'un d'eux. Beaucoup sont couverts de végétation, presque de forêt. Certains ont gardé leur aspect sombre, noirs gardiens de la plaine.
Nos terrils sont là. Ils veillent sur nous, même quand nous sommes loin. Cela paraitra sans doute étrange à ceux qui n'ont pas grandi sous leur ombre, nous les aimons et pour rien au monde nous ne voudrions les voir disparaître.
Terril de Loos en Gohelle (licence creative commons)