Marie-Antoinette

Publié le 05 avril 2011 par Papote

Attaqué à peine quelque heures après la biographie de Chuchill, j'ai trouvé le début difficile mais c'était une bêtise car c'est une biographie tout aussi facile à lire et tout aussi passionnante.
Oui, je suis d'accord tout le monde connaît Marie-Antoinette depuis sa plus tendre enfance (même P'tite Louloute la connaît déjà !), tout le monde connaît Madame Déficit, l'Autrichienne honnie de tout le peuple français de la fin du XVIIIè siècle et je pensais également la connaître...
Oui, je le dis très sincèrement quand Fratribus Professorus et Madame Mère m'ont conseillé cette biographie, j'ai dit "oui" mais sans grande conviction me disant que, ouarf, bof, au moins je lirai un livre bien écrit...
Et pourtant...
Certes, on connaît ce que les livres d'histoire en racontent, on connaît ses dates, on connaît la surface polie des portraits de Mme Vigée-le-Brun...
C'est cela ! On connaît une peinture plate, uniforme et colorée.
Là où je me suis faite prendre par ce livre (hormis la qualité du style de l'auteur mais ça... ce n'est pas une découverte !), c'est qu'on ne nous raconte pas l'histoire de la plus célèbre reine de France, on nous raconte la plus célèbre reine de France...
Ce n'est pas seulement un énième catalogue factuel, c'est aussi une étude psychologique, morale, intime de Marie-Antoinette d'Autriche...
J'ai été d'ailleurs assez surprise car l'affaire du collier est "expédiée en un chapitre, par exemple, mais quel chapitre.
J'ai vraiment capté pourquoi Marie-Antoinette haissait tellement le cardinal de Rohan et comment toutes ces invraissemblances ont pu aboutir à un tel scandale.
En revanche, on passe des pages et des pages sur sa vie de dauphine de France, sur l'échec de son mariage les premières années, sur ses relations épistolaires avec sa mère.
J'y ai découvert et compris pourquoi et comment elle est devenue l'image d'Epinal qu'on en a, tout en ayant l'impression de le faire par le trou d'une serrure à Versailles... En ayant parfois de la pitié, parfois de la compassion et parfois (souvent ?) envie de lui coller une bonne paire de claques devant son inconsistance et son inconséquence.
L'impression du film de Sofia Coppola  (excellent au demeurant !), intime mais avec une rigueur historique absolue et qui, de surcroît, balaie toute la vie de la reine et pas seulement ses premières années...
Malgré tout, les images d'Epinal ont toujours un fond de vérité. Elle était terriblement orgueilleuse et inconséquente mais ce qu'on sait moins c'est qu'elle ne détestait pas le peuple, elle l'aimait bien mais était trop imprégnée des places de chacun dans la société pour comprendre la Révolution. Elle pensait juste que quelques agitateurs faisaient du bruit mais que le bon peuple finirait par rentrer dans le rang parce qu'elle était née pour être en haut et eux en bas et qu'il ne pourrait jamais en être autrement car c'était l'ordre des choses. Par conséquent, elle n'a jamais transigé avec qui que ce soit puisqu'elle ne comprenait pas le danger qui la menaçait.
Ce qui est très intéressant aussi, c'est qu'on la présente toujours comme une conspiratrice (qu'elle a été, allant même jusqu'à la haute trahison), notamment à partir du moment où ils ont été ramenés à Paris, mais ce qu'on sait moins c'est qu'à partir de ce moment là, elle a oublié toute futilité pour prendre la mesure de ce que doit être une reine, en travaillant (dans le plus mauvais sens mais travaillant quand même !) avec ministres et ambassadeurs plus que son mari dont l'éternelle indécision l'a mis à l'écart du pouvoir.
Cela n'excuse en rien ses mauvais choix et son orgueil démesuré  mais je trouve que c'est intéressant et, particulièrement, quand on sait que sa fille sera considérée par Napoléon comme le seul "homme" de la famille royale lors des 100 jours.
On découvre une femme qui se révèle dans l'adversité...
Je ne savais pas non plus à quel point, les conditions d'incarcération à la Conciergerie avaient été à ce point dégradantes...
Autre image d'Epinal qui aura volé en éclat à la lecture de ce livre, c'est l'auréole de gloire dont était affublé Lafayette en héros des fameuses journées d'octobre alors qu'en fait, si la famille royale a été ramenée à Paris, c'est en grande partie sa faute car il était parti dormir au lieu d'assurer la protection de la famille royale dans le palais assiégé par les parisiennes.
On y découvre également par petites touches éparses un Louis XVI qu'on nous présente trop rarement. Bon gros bourgeois bienveillant, oui, mais pas que...
C'était un faible, pas idiot mais inapte à la moindre réaction politique, humaine ou militaire, un véléitaire, un apathique de première mais complètement largué à partir du moment où la révolte a grondé et son incapacité à décider et réagir l'ont mis à l'écart...
Alors, qu'au fond, il semblerait qu'il ne fut pas complètement idiot mais que sa lenteur d'esprit l'empêchat d'exploiter les quelques capacités qu'il avait.
Ce qui est finalement assez terrible, c'est de voir s'enclencher chaque petite pièce de la machinerie infernale inexorablement, de constater cet enchaînement incroyable et rocambolesque de maladresses, d'aveuglement, d'inconséquence et de ne rien pouvoir faire.

Un petit bémol sur le style... J'ai trouvé la fin un peu emphatique... La question que je me pose est : est-ce-qu'il était emphatique dès le début mais que ça passait bien sous les dorures et la magnificence de Versailles ou est-ce-qu'il s'est laissé un peu emporté par la fin tragique de la reine...
A part ce petit détail, j'ai beaucoup aimé l'écriture de Stephan Zweig qui est fluide mais soutenue sans être empoulée...

Maintenant, je fais un break sur les biographies historiques !
Pourtant, j'en ai une sur Richelieu qui m'appelle à corps et à cris mais, là, non, j'arrête un peu... Un ou deux autres genres de livres à intercaler pour ma bonne santé mentale...

(Petit plaisir de lecture pour la première fois de l'année au soleil du jardin, allongée dans l'herbe tendre...)

A bientôt !

La Papote
PS : Décidément, j'avais deux phrases à dire mais c'était réellement un rôle historique puisqu'il en est également fait mention dans ce livre. "Madeleine Chambry... J'étais bouquetière au palais royal mais qui songe à acheter des fleurs quand l'argent manque pour acheter du pain...", "Sire, du pain !"