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Interview sclérose en plaques

Publié le 02 février 2008 par Pat La Fourmi
A l'occasion du congrès suisse Quadrimed 2008, consacré cette année à la neurologie, le Dr Claude Vaney, président du congrès et médecin-chef en neurologie à la clinique bernoise a été interviewé:

Docteur Vaney, quelles sont les personnes les plus touchées par la sclérose en plaques?

Une personne sur 1000 est atteinte par cette maladie en Suisse. C'est la troisième cause d'invalidité chez les jeunes dans notre pays. Deux tiers des malades sont des femmes, pour des raisons qui ne sont pas encore bien connues mais qui ont un rapport avec les hormones. Les premières manifestations apparaissent entre 20 et 40 ans.

Quels sont les symptômes révélateurs de la maladie?

Il vaut mieux parler de symptômes évocateurs, car la sclérose en plaques se manifeste par des signes qui peuvent aussi se rapporter à d'autres maladies. Mais si vous avez, de façon assez soudaine, des troubles de la vue, une perte de la sensibilité, des fourmillements dans les extrémités, des problèmes d'équilibre ou des difficultés à marcher, il vaut mieux consulter votre généraliste qui affinera son diagnostic par une résonance magnétique entre autres.

Peut-on guérir de la sclérose en plaques?

Non, hélas, mais on peut soulager les malades. Il existe sur le marché des médicaments (des immunomodulateurs) qui peuvent réduire d'un tiers la fréquence des poussées. Le mot «poussée» désigne les crises par lesquelles la maladie frappe. Certaines poussées laissent des séquelles. La cortisone, administrée ponctuellement, peut stopper une poussée et en atténuer la symptologie. Avec une bonne prise en charge du patient, tant par le généraliste que le neurologue et des médicaments adaptés, on peut diminuer l'impact de cette maladie. Il faut aussi savoir qu'il existe des patients qui ne font qu'une seule poussée dans leur vie. Il faut en finir avec le message: sclérose en plaques = chaise roulante!

Cette maladie est-elle héréditaire?

Non. Il peut y avoir une prédisposition génétique, mais ce n'est pas inéluctable. Si un de vos proches est touché par la sclérose en plaques, vous avez peut-être 1 risque sur 100 de développer cette maladie un jour, ce qui est relativement faible.

Y a-t-il une «personnalité» sclérose en plaques? Autrement formulé, peut-on faire un portrait robot des personnes susceptibles d'avoir une sclérose en plaques?

Non. On évoque parfois un type de caractère plus marqué, plus de susceptibilité, plus colérique, mais ce n'est pas vérifié.

Bien sûr, c'est une maladie lourde qui n'est pas facile à vivre et qui peut engendrer une certaine colère ou un état dépressif. Le médecin doit en tenir compte et adapter son traitement. Le malade a besoin de parler avec des personnes vivant la même chose que lui. Un des buts des séjours à la clinique bernoise, c'est la rencontre et l'échange d'expériences avec des personnes qui partagent le même sort. Une pause de trois ou quatre semaines en clinique permet aussi à l'entourage et aux familles de reprendre des forces. Car cette maladie requiert un accompagnement intense sur une longue durée.

L'alimentation joue-t-elle un rôle dans la lutte contre la sclérose en plaques?

Les adeptes de Kousmine prétendent que le régime de la doctoresse est miraculeux. Rien n'est prouvé scientifiquement. Bien sûr, l'apport d'acides gras polyinsaturés, l'utilisation d'huiles garanties de premières pression à froid et une nourriture saine et équilibrée contribuent au bien-être du malade comme de chaque individu d'ailleurs. Mais je ne pense pas qu'un régime puisse changer le cours de la maladie.

Chaque fois que la médecine traditionnelle est impuissante, 60% des malades vont chercher une solution vers les médecines dites douces ou parallèles. Pourquoi pas? Le médecin doit accepter et respecter ces démarches. Le patient, lui, ne doit pas hésiter à en informer son médecin traitant. Il est important d'établir une relation de confiance et de dialogue.

On dit que le cannabis peut agir sur certains symptômes de la sclérose en plaques?

Le THC a des propriétés calmantes, principalement sur les contractures musculaires. De plus, il a des effets favorables sur la vessie (les patients atteints de sclérose en plaques ont du mal à contrôler leurs mictions); plusieurs études contrôlées le confirment. Au Canada, un spray à base de chanvre, à gicler sous la langue, est en vente sur ordonnance. Aux Pays-Bas, la vente libre de cannabis permet aux malades de s'approvisionner sans problème. En Suisse, toute vente de cannabis est interdite. Beaucoup de malades ont donc recours au marché noir, ce qui ne permet pas de connaître le taux de THC contenu dans le chanvre qu'ils consomment. Mais les choses bougent, il y a des préparations synthétiques auxquelles les patients pourraient avoir bientôt accès sur ordonnance.

Je précise toutefois que, comme pour les opiacées, il faudra administrer le THC de façon contrôlée. Car la consommation régulière de cannabis chez les jeunes peut provoquer de sérieux problèmes psychiques et ceci n'est pas à prendre à la légère.

PROPOS RECUEILLIS PAR FRANCE MASSY


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