Previously on kevinades.over-blog.com: j'ai abordé avec vous l'importance de l'humour dans l'enseignement. Pour le moment j'ai surtout évoqué les écueils à éviter, avant de conclure sur une grande question que n'importe quel enseignant débutant pourrait légitimement se poser:
Le jeune enseignant débutant, se demandant légitimement: − « Mais quel type de langage pourrait me permettre de faire rire mes élèves, m’assurant ainsi gloire et respect jusqu’à la fin de l’année ? »
Je vous vois tous
d'ici, amis lecteurs, dire que c'est un jeu d'enfant et qu'il suffit d'adopter le toujours efficace pipi-caca-prout! Mais je dis non, trois fois et demi non, c'est beaucoup trop banal, facile...
Un peu d'ambition que diable!
En se creusant un peu la tête, on constate qu'il existe des mots, pourtant relativement classiques, qui pour une raison mystérieuse font rire les gosses.
Parce que, qu’on se le dise, c’est con, un gosse.
Il n’est ainsi pas rare de déclencher un fou rire général au simple usage des mots « banane », « patate » ou « cucurbitacée »… Et que dire du mot « slip »!
Pourquoi ces mots en particulier ? Pourquoi « patate » fait-il plus rire que le mot « grammaire »… (Avez-vous déjà vu un gosse rire en entendant le mot « grammaire » ?). Pourquoi « banane » plutôt qu’ « antépénultième » (quoique celui-ci possède un certain potentiel, à tester…) ?
Toutes ces questions mériteraient au moins une thèse de doctorat, mais en attendant, le fait est que ça marche !
Si vraiment ça ne fonctionne pas, il reste toujours un ultime recours. Non, il ne s’agit pas de Chuck Norris ou de Steven Seagal. Car il existe encore mieux.
Nous avons vu précédemment qu’utiliser les recettes qui fonctionnent avec des adultes n’est pas forcément le moyen idéal de faire marrer une classe.
Cependant, il est maintenant temps de nuancer ces propos. Car il existe un domaine humoristique universel, qui fait rire de 7 à 77 ans. J’ai nommé l’humour pipi-caca. D'ailleurs je suis pour le moins surpris que vous n'y ayez pas songé plus tôt! Certes, quelques enseignants un peu élitistes ne jurant que par la poésie et un humour aussi fin que délicat rechigneront peut-être à manier ce style populaire. Fous qu’ils sont.
Parfois difficile à placer, une bonne blague pipi-caca dévoilera subtilement à vos élèves les vestiges d’humanité et de sensibilité qui subsistent encore dans l’incarnation faite homme du concept de perfection qui trône chaque jour devant eux (oula, celle-ci vous avez le droit de la lire en deux ou trois fois).
Daigner de temps en temps se mettre à hauteur de ces petites créatures inférieures que l’on nomme enfants leur rappelle ainsi de manière salutaire qu’il y a longtemps, avant de devenir cet être d'exception, vous aussi, vous avez été un petit crétin de dix ans. Et ça, ça n’a pas de prix.
Comme je l’ai rapidement mentionné, la difficulté avec les blagues pipi-caca, c’est de les amener de manière opportune. Heureusement, certaines matières, certains thèmes abordés en classe s’y prêtent plus que d’autres. C’est le cas des sciences et de la leçon sur la digestion.
Alors là, c’est la fête ! Non seulement vous n’avez pas à chercher des astuces plus ou moins capillo-tractées pour parvenir à placer une bonne blague pipi-caca, mais mieux que ça, faire ces blagues devient quasiment un objectif en soi ! Faire des schémas, lire des textes, faire des expériences autour des mots « excréments », « urine » et j’en passe, est forcément source de franche rigolade pour les mômes. Du coup, vous assurez comme une bête, vous êtes drôle, les gosses vous vénèrent et vos classes baignent dans une ambiance guillerette voire franchement festive.
Bien joué.
Et sincèrement, être celui ou celle qui apprend à des gosses la signification du mot « anus », ça n’a pas de prix !
Chaque année, le thème de la digestion est donc forcément prétexte à moult kevinades. Comme vous êtes là pour ça, en voici une plutôt mignonne. Comme souvent en sciences, on commence par jauger ce qu’ils savent sur le sujet abordé. En l’occurrence, je leur demande de faire un dessin censé répondre à la question suivante : « si vous mangez un bout de pomme, que devient-il une fois entré dans votre bouche ? »
Evidemment, à partir de là, on a un peu, si vous me pardonnez, à boire et à manger : du corps pour lequel il faut une certaine dose d’imagination avant de percevoir qu’il est humain au schéma sans aucune explication en passant par le précis d’anatomie ultra exhaustif pour lequel on est obligé de vérifier les infos, on trouve de tout !
Et puis... on trouve des poètes, qui avec un bout de pomme sont capables de vous faire rêver : en voici un exemple que malheureusement je n’ai pas scanné.
Appelons l’auteur de ce schéma Kevin. Un peu d’imagination vous sera nécessaire pour visualiser son travail.
Tout commence dans la bouche, où notre petit bout de pomme débute son périple trépidant. Il n’y reste pas très longtemps, puisque bien vite il entame une descente vertigineuse vers une zone assez large et creuse qui semblerait bien être l’estomac.
La suite ?
Une nouvelle descente du morceau de pomme par le biais d’un tuyau vers une protubérance maladroitement dessinée : nous sommes dans ce qu’il serait convenu d’appeler le pénis.
De cet appendice sortent de longs jets.
A côté de ces jets, une légende griffonnée au crayon à papier : les mots sont logiques quoique légèrement erronés, mais tellement poétiques. Cette légende conclue le trajet épique du bout de pomme en intitulant sobrement ces grands jets: « jus de pomme ».
De la poésie, vous disais-je.