Alors j’ai mis de côté La canicule des pauvres. J’avais lu quelques critiques dont celle de Venise. J’ai aimé les vingt premières pages parce que nouveau, parce que très ville, parce que certaines phrases m’ont frappée (évidemment je ne les retrouve pas et pressée de lire, je n’ai pas pris le temps de les noter), parce que la technique du parler-narration-pensées était intéressante, mais le sujet et tous ces fumeurs-de-pot-buveurs-de-bière-et-prostituées... tellement loin de moi. Ne me suis attachée à aucun personnage.
Je voudrais surtout n’avoir aucune impression à propos de n’importe quel roman. Des impressions de lectrice oui, à la limite mais pas de réactions d’auteure-qui-lit-en-se-demandant-si-les-autres-penseront-la-même-chose-du-mien.
Qu’est-ce que je vais faire de moi? À ne penser qu'en fonction de mon roman à venir, je ne tiendrai jamais le coup jusqu’en septembre. En attendant, ce n’est guère mieux, j’ai délaissé ma lecture, j’ai jeté un coup d’œil sur Un dé en bois de chêne de Suzanne Jacob que j'aime bien pour sa différence, son audace et je suis retournée en zone sûre, dans ce monde où je ne pense pas tellement je suis concentrée sur le texte à aligner, la couleur à choisir, le fichier à importer : dans la technique.
Sauf qu’au lieu de corriger le site d’un client, j’ai créé un nouveau site… pour mon roman Les Têtes rousses. Au moins ça m’amuse et je suis dans une zone connue. Je suis bien avancée, les questions ressurgissent : quand est-ce que je vais publier ce site? Bien avant la parution du livre? Juste quelques jours avant? Je devrais en parler à mon éditeur. Belle nouille, tu es encore dans ton roman.
Pendant quelques secondes, j’accuse l’âge — surtout en avril quand on te le rappelle la semaine avant, le jour même, le jour où on te fête, le jour où on y a pensé en retard — je me dis que je n’ai plus de temps à perdre à lire ce qui ne m’intéresse pas vraiment. Mais à bien y penser, j’ai toujours été ainsi : pressée de passer à l’activité suivante. Je me lasse rapidement de tout ou presque. J’ai toujours hâte à l’instant d’après.Comme on cherche une talle de framboises plus fournie.
(image empruntée à une ferme du Québec)