Autour du cou, il a des écouteurs en forme de stéthoscope, branchés à son mp3. Et je lui demande pourquoi il veut pas me le prêter. Alors qu’il les prête à tout le monde. Et il me fait croire qu’avec, on peut entendre son inconscient. Que ça pourrait être violent. Pour moi. Et que pour le moment, il préfère qu’on s’en tienne au “jeu du boomerang”. Quitte à tricher. A sauter des niveaux. Mais moi j’en ai marre des boomerangs sans retour. J’ai l’impression que chaque fois, on m’envoie sur la Lune. Et que je reviens avec une photo de la maison huit en Pluton. Alors je lui arrache son casque 3D intra cérébral de psy. Et quand je le mets sur mes oreilles, j’entends une voix qui me dit que faudrait qu’on arrête de marcher en crabe, nous les cancers, surtout ceux du premier décan, parce qu’on la connait notre combine,et qu’elle devient lassante. Que côté travail, faut qu’on garde le cap. Derrière, y’a un bruit lancinant. Qui revient à intervalles réguliers. De plus en plus assourdissant. Comme une sirène. Quelque chose qui m’empêche d’entendre le fond de mes pensées, derrière l’horoscope et la météo - qui ne peuvent en être que la couche très superficielle. La peau. L’épiderme. Quand soudain, je m’aperçois que c’est pas les miennes. Mais les siennes. De pensées : celles de mon psy. Et qu’il est très en colère : “Mais putain… tu vas l’éteindre ton putain de réveil”. Me crie-t-il. Sauf que c’est pas mon psy. Que je ne suis pas dans une clairière en train de suivre des yeux un boomerang en pleine mutation. Mais dans mon lit. Et qu’il est midi. J’ai rendez vous avec Betty à 15h30. J’ai le temps de me rendormir une petite heure. Le temps de rembobiner. De reprendre. Faut absolument que je sache. Alors je ferme les yeux. Je me concentre. Et pile au moment où je remets le casque, racordé à la bonne fréquence, cette fois, mon téléphone sonne. C’est Maître Gaillard. Mon avocat. Il m’annonce qu’après 3 ans de bataille acharnée, je viens de gagner mon procès contre Nutella. Que les experts ont estimé que la célèbre pâte à tartiner n’avait effectivement pas le vrai gout du bonheur. Pas plus qu’Herta n’avait celui de l’authenticité. Comme je l’avais prouvé trois ans auparavant.