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Deux gars sua job

Publié le 29 avril 2011 par Hugo Jolly

Deux gars sua job

-«Aïye» camarade, tu sais quel jour on était hier? C’test l’jour où on commémore la perte des vies humaines au travail.

-Ouin, pis? Moé, je fais ma p’tite affaire, pis le reste, je m’en calice. Je fais attention, t’sé.

-Tu t’en calices qu’un des nôtres crève à se faire exploiter par le Boss? Après ça, ce gros christ-là va flamber le fruit de notre travail sur des osties de cochonneries qui pourra même pas s’occuper lui-même. Pis toé, ça te fait rien…

-Minute là! Y crée de l’emploi en employant le monde autour de lui, y feraient quoi eux autres, sinon? Pis ton affaire là…, je te voé venir avec «ton syndicat», tu vas me voler ma paye mon ostie! Les syndicats sont trop puissants, pis coûtent trop chers…

-Tu rentres déjà travailler chaque matin pour te faire voler les fruits de ton travail, kossez ça peut ben te faire de plus? Pis l’autre, si y’engage, c’est toujours ben parce qu’y a les moyens de le faire… Pis les syndicats sont pas aussi puissants que la minorité du patronat, tabarnak, ils ont le gouvernement, les instituts à la con comme Fraser, Cyrano et IEDM, les médias privés et mêmes les médias d’État, puisque l’État sert en ce moment les intérêts de la minorité parasitaire patronale, que le gouvernement leur commande de défendre.

-Ben le Boss là, ses moyens, il a travaillé pour…, T’sé, le gars a pris des risques.., il a…

-Minute là toé, je viens tout juste de te dire que c’était aujourd’hui le jour de souvenir pour nos camarades salariés tombés au combat, pis toé, tu me parles de sacrifices? Pis eux? Ils n’ont rien sacrifié pour faire fructifier le ô kapital? La vie serait pas le sacrifice ultime après tout?

-Ouin, vu de même. Mais les efforts, eux? Ces gars ont travaillé fort pour avoir leur entreprise, ils ont tout…

-Chut, attends, le Boss passe…, faud…

-Ouin, pis tu sais qu’on n’a pas le droit de parler de politique au travail, tu te l’est déjà faire dire…, pis ça mis Fernand dans marde.

-Pourquoi tu penses qu’on a pas le droit?!? Précisément pour qu’on fasse pas ce qu’on fait là. Démystifier les mythes créés par ceux et celles qui profitent de c’te système de cul là. Quand je te parle du fait que tu fais partie d’une classe et que t’as des intérêts ben différents que ceux de ton Boss, c’est pour que tu sois apte à faire les changements nécessaires sur toé-même, pour que les choses changent autour de toé, après…

-Je veux ben moé, mais…

-Pis pour revenir sur les sacrifices, saches qu’un Québécois meurt tous les quatre jours au Québec, dans un accident de travail. En 2009, y a eu 190 pertes de vie de travailleurs, des gars comme toé pis moé qui veulent juste mettre du pain sua table. Pis y a pas de suivi de la veuve et l’orphelin dans ce compte là, c’pas comme avec le prince William et sa douce, qui vont coûter près de 10 milliards, pendant que le Boss des bécosses de la Grande-Bretagne, Cameron, impose ses plans d’austérité! Gros crotté! Conservateur de mes deux..!

-Ok pour les sacrifices là, j’ai compris. Mais les efforts eux? T’as pas répondu à ça. Tu sais pas quoi dire?

-As-tu un «méritomètre» toé?

-Non.

-Ben comment tu fais pour évaluer les efforts de chacun, selon les possibilités de chacun?

-Ben là, t’es voé ceux qui veulent, pis ceux qui se pognent le cul.

-Ah oui? Pis toé? Tu te pognes-tu le cul icitte?

-Christ non, tu’l sais ben trop. On n’a juste pas le temps, pis le Boss serait en beau ciboire.

-Justement, faque comment t’expliques que ton Boss finisse à midi, qui recueille les fruits de tes efforts, pis qui te demande constamment d’en faire plus qu’y en fera jamais, ce paresseux là? C’est qui, entre lui pis toé qui fait le plus d’effort? «Toé». C’est qui qui profite des efforts de l’autre, lui. C’est ti pas beau ça?

-Ben je voudrais pas gérer sa business, «moé», ça a l’air facile de même, mais pas sûr que tu serais capable toé non plus, «moé».

-Peut-être que là je n’ai pas les conditions gagnantes pour gérer son entreprise, mais avec des études et tout le tralala, je serais capable, peut-être.

-T’avais juste à étudier, jaloux…

-J’avais pas d’argent et j’ai fait d’autres choses, compte tenu de mes intérêts d’alors.

-Ben voilà.

-Non, pas du tout. Notre famille vivait des problèmes, les parents étaient en instances de divorce.

Ciboire Denis…, tout le monde n’as pas le même cheminement, tu l’sais ben toé. T’as perdu ta femme d’un cancer qui l’a emporté sans rien demander, ben trop jeune….

-Laisse ma femme tranquille.

-Scuse Denis, désolé. Je me su senti obligé de citer c’t exemple là, pour te démontrer que tout le monde avait pas le même parcours de vie. Pour te montrer que tout le monde commence pas avec le même arbre à «cash». Regarde Péladeau, Pôpa a tout fait à sa place.  Pareil pour beaucoup d’autres bourgeois «Québécois».

-Je le sais ça.

C’est vrai que ça a pas d’ostie de bon sens ça. C’est vrai que c’est contradictoire. Chu gêné de te le dire, mais christ, t’as raison. Mais qu’est-ce tu veux qu’on fasse?

T’sé, notre Boss, c’est la troisième génération. Y a rien fait, lui, pour se mériter, selon leurs excuses habituelles, tout ce qu’y a.  Mais comme je te dis, qu’est-ce tu veux qu’on fasse? Mais t’as raison…

-Justement! Pis c’pour ça que qu’il faut être fier de NOS sacrifices! C’pour ça qu’y faut souligner la perte de vie de certains de nos camarades, non pas nécessairement pour nos Boss, mais pour souligner surtout, le fait qu’y aient contribué de leur vie pour répondre à demande de la société dans laquelle y vivaient. Y en aura toujours des accidents, c’est juste dommage. Mais si seulement on pouvait cesser de mourir pour les intérêts d’un autre, d’une seule personne, ou d’un groupe préférentiel de personnes. Ça serait déjà ça!

-C’pas possible c’te monde là. Tu rêves.

-Tu penses?

-Mets-en! Ben trop ingrats les gens autour de nous. Regarde Paul… Il s’achète toujours 3 sacs de chips au dîner, pas foutu d’en partager une calice!

-C’est vrai qui y a du monde assez égoïste, mais commençons par nous même, camarade. C’est souvent par soi-même que le changement ne se fait pas…

-Faque tu disais…

-Je disais donc que c’était un jour de souvenir pour nos camarades créateurs de richesses.

-Ouin, des richesses qu’on goûte pas trop.

-Justement!

-Et tu proposes quoi pour faire changer les choses?

-Qu’on travaille pour nous-mêmes, dans des coopératives.

-Mais dans l’immédiat, là, y a tu une marche?

-Y en avait une hier, mais tu peux te reprendre pour la journée revendiquée par les travailleurs du Québec, dimanche, le 1er mai. Ce sera la fête des travailleurs, une autre belle occasion de souligner notre contribution à la société, pis de …

-Ouin, on contribue et on tète ensuite pour goûter un peu de c’te richesse là. Pis y veulent pas nous en donner plus qui faut…

-Les Boss ne nous donneront jamais ce qu’on veut. Le système est ben trop bon pour eux. Faudrait changer de système économique…

-Pis mettre quoi à la place?

-Notre propre diktat.

-Notre dictature?

-Précisément.

-Euh…..

«Hey! Travaillez donc calice, je vous paye pourquoi moé? Arrêtez de jaser!»



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