Comme je vous l’ai indiqué dans mon précédent article, nous ne disposons d’aucune information écrite sur les MacDonald de Glencoe, depuis la fondation du clan par Iain Fraoch (début du XIVe siècle) jusqu’à la chute des Seigneurs des Iles en 1545.
Pendant cette période, aucun acte de naissance, de décès ou de mariage, aucune attestation d’acquisition, aucune plainte, pas même un acte de propriété pour leur territoire n’a été rédigé.
Ceci prouve que durant ces deux siècles, les Mac Donald de Glencoe sont demeurés étrangers aux usages de la société normando-écossaise (cf.: article Lowlander d’Ecosse dans la rubrique Histoires et Enigmes…). Ils n’entretenaient aucune relation avec les clans loyaux à la couronne, et considérait le Seigneur des Iles comme leur unique autorité.
Afin de vous rappeler les particularités de la Seigneurie des Iles, j’aimerais vous traduire un extrait de l’ouvrage de l’historien Raymond Campbell (!) Paterson, intitulé The Lords of the Iles :
… Au moyen-âge – alors que dans l’Est du royaume, les grands nobles construisaient des châteaux pour se protéger des Anglais ainsi que de leurs propres voisins – une institution politique unique prenait forme chez les gaels de l’ouest écossais. Elle se nommait la Seigneurie des Iles, et était la plus haute expression de l’organisation géniale des clans Donald. A une époque où le roi d’Ecosse se méfiait de son entourage, le seigneur des îles vivait en paix et en sécurité au milieu de son peuple. Son autorité assurait aux gaels d’Ecosse une unité politique et culturelle jamais égalée. Elle était garante d’une tradition et d’une continuité depuis St Colomba et la fondation de Dalriada…
Bien que rattachée à l’Ecosse depuis le traité de Perth, la Seigneurie des Iles - anciennement Royaume des Iles - exprimait clairement son mépris pour la couronne et sa volonté d’indépendance.Pour autant, il apparaît que les Mac Donald de Glencoe n’aient jamais manifesté une hostilité ou intention belliqueuse à l’égard de leurs voisins étrangers, pas plus qu’une propension au pillage ou au vol de bétail.
Chose curieuse pour un clan que l’on accusera plus tard de barbare, voleur, pillard et traître inhumain !
Devons-nous imaginer qu’avant 1545, les Mac Donald de Glencoe menaient une existence paisible et simple sur leurs terres ? Certes, leur vie était régie par des us et coutumes gaels, incluant le respect de la famille, des biens, …, et de la parole donnée… Mais tout de même…
Nous savons que les ressources naturelles de Glencoe – comprenant la rive sud du loch Leven, la vallée de la Coe, celle de Dalness, la lande de Rannoch ainsi que les pâturages du Mont Noir - n’ont jamais suffi à nourrir un clan d’environ cinq cents personnes (population moyenne de Glencoe entre 1545 et 1745).
Pour survivre décemment, les Mac Donald de Glencoe devaient donc bénéficier d’autres sources de revenus…
Un second élément troublant me permettant de rejeter l’idée d’un clan de Glencoe pacifique se situe au niveau de leur réactivité, quand le seigneur des îles se trouva menacé par le roi d’Ecosse. En effet, les Mac Donald de Glencoe n’hésitèrent pas à prendre les armes pour le défendre ; leurs guerriers s’avérèrent des plus redoutables, leur connaissance du terrain parfaite, et leur chef un tacticien digne de son lointain ancêtre Somerled.Est-il concevable qu’un clan aussi petit, évoluant au sein d’une seigneurie en paix, ait continuellement formé des guerriers d’élite, éprouvés aux techniques de combat gall-gaels ? Certainement pas…
J’émets donc l’hypothèse suivante. Dans la mesure où Glencoe ne suffisait pas à nourrir une population d’environ cinq cents personnes, le clan a certainement assuré sa subsistance en constituant la réserve armée des Seigneurs des Iles ou bien en proposant des services de mercenaires.
Pour soutenir cette dernière théorie, je me réfère à deux missions délicates confiées aux Mac Donald de Glencoe, en 1603 et en 1650. Je m’appuie également sur les propos du Marquis de Montrose qui fera l’apologie des guerriers de Glencoe, en les comparant à des géants dignes de la mythologie et en recommandant leurs services à ses pairs officiers.
Enigme historique : les Mac Donald de Glencoe si discrets pendant deux siècles (pour ainsi dire inexistants), puis révélés sous les traits de farouches guerriers, me fait penser à une légende ayant trait aux géants de Fingal endormis. Quelle est cette légende ?
Question subsidiaire pour les super doués : quelle mission a-t-on confié en 1603 aux Mac Donald de Glencoe ?