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Souvenir Lumineux

Publié le 02 mai 2011 par Paumadou

Souvenir Lumineux

Je me souviens essentiellement de la lumière dorée sur les roses du jardin. Il y avait une balançoire aussi. Un vieux portique en métal vert foncé, peut-être bronze… Je n’en sais rien. En fait, c’était certainement un ajout de mon esprit, une occupation que j’aurais aimé y trouver. Pourquoi mettrait-on une vieille balançoire dans le parc d’une maison de retraite ?
Je me souviens de la lumière sur les roses, anglaises évidemment, ça, je suis à peu près sûre de ne pas l’avoir imaginée. Quoi que…

Je me souviens du carrelage du rez-de-chaussée. Un large couloir et la lumière toujours dorée qui tombait presque à l’oblique sur les carreaux peints. Les arabesques de bruns, d’ocres, de blancs. Ce souvenir-là aussi est douteux. Pourquoi prendrait-on la peine de poser des grès décorés sur le sol d’un asile de vieux ? Et puis ce couloir large qui longeait le jardin… Etrangement, il ressemble au couloir de mon école primaire. Sauf que je suis à peu près sûre qu’à l’école, le carrelage était noir et blanc. Presque. Pas orné d’arabesques en tout cas. Non, les arabesques, il y en a sur les carreaux de la cour de la maison de ma grand-mère. Mais ce ne sont pas les mêmes que celles de mes souvenirs
.Je me souviens des arabesques, mais c’est sans doute un amalgame de plusieurs réalités. Et cette lumière dorée de fin d’après-midi. Comme si tous mes souvenirs étaient liés à cette impression de fin d’automne lumineuse et chaude. Juste avant l’hiver. Une dernière fois…

Je me souviens de la chambre, à l’étage. La lumière y était bleutée. Pas froide, c’est une sorte de nuage de bleu chaud et doux. Je me souviens d’un pied de lit, sans doute médicalisé, des cadres de photos, peut-être une armoire miel dans un coin, une plante ? Non, dans mes souvenirs c’est un vieux bouquet de fleurs séchées. Aucune odeur, pourtant entre les roses, le sol astiqué du couloir et les soins médicaux, il devaient bien y en avoir, mais je ne me souviens que de la lumière dorée sur les pétales de roses, le jardin luxuriant, le portique, le carrelage du couloir… je me souviens même pas de l’escalier, du couloir de l’étage, ni de la porte. Et je suis dans ce cocon bleu mêlé de chaleur.

Je ne me souviens pas de son visage, ni de sa voix. Non, juste la lumière bleutée qui décline doucement. Une dernière fois…


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LES COMMENTAIRES (1)

Par rechab
posté le 10 mai à 23:09
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Avec cet extrait de Leone et les siens de Claude Roy


Et il est évident, à qui contemple les deux pans du mur emplissant la surface de la toile, de chaque côté de la porte, que le blanc du pisé, de la chaux crépie, est baigné, dans la pièce, par les reflets gris-noir et gris-bleu de la lumière sur le carrelage ardoisé. Mais la résonnance assourdie de ce blanc cru, amorti d'un reflet bleuâtre, irisé d'un bleu-gris léger, qui effleure à peine la surface grenue, rêche, du mur, répand comme un écho lointain, exténué, presque inaudible, à la seule tache de couleur vraiment franche et soutenue de la toile, , la jupe bleu-lavande de la jeune-femme qui entre, jupe peinte avec vigueur, posée nette, sans ces cuisines, ces mélanges, ce triturage savant des blancs du tableau. Car il y a autour de cette tache bleue, un jeu secret de blancs, et la dominante du tableau, ce mur pâle mêlé de bleu et de gris atténué, très pâle, cette dominante joue avec les eux autres blancs, celui du corsage, celui du ciel, que le peintre a saisi à cet instant de la journée d'août où le ciel est comme décoloré, délavé de son bleu par l'intensité de la chaleur, devenu l'orifice d'une fournaise haletante, souffle immobile, brûlant, éclatant mais sans couleur, où il n'y a plus de reflets ni de nuances, seulement une sorte d'incandescence bleue, une insoutenable blancheur vaguement caressée de feu pâle.

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