« Show will go on »

L’âne et l’éléphant, par French Fry

 

Il m’aura fallu 24H de lecture web et papier et de podcast divers, 24H de retombée de news, déposées au fond de la tasse comme un bon vieux marc, pour y voir clair. Il faut dire que tout le monde s’est précipité. Il fallait entendre France Info clamer la victoire de Madame H alors que les derniers bulletins n’avaient pas encore touché le fond de l’urne. C’était aussi sans compter avec le vote des Américains à l’étranger, que l’on oublie souvent (11 délégués). Tout indiquait que la messe n’était pas dite.

Deux chiffres prouvent à eux seul que la bataille reste serrée : Hillary = 7 427 700 voix ; Barack 7 369 798. Cela se passe presque de commentaires… Il en résulte un court avantage de moins de cent délégués seulement sur 1600 déjà répartis entre les deux candidats, et un total de 2 025 pour le camp démocrate. Monsieur O compte 13 états de plus, Madame Clinton seulement 9, mais parmi les plus peuplés et les plus symboliques. Elle gagne à New York sans surprise car c’est son territoire, tout comme Barack a gagné l’Illinois. Sa vraie victoire est la Californie où Barack compte cependant de très nombreux soutiens officiels dont celui d’Hollywood (le dernier en date est celui de Robert de Niro). Le seul signe véritablement inquiétant pour Mister O est la victoire clintonnienne dans le Massachussett et le New Jersey qui sont des fiefs Kennedy, famille pourtant ralliée à sa cause.

Récapitulons la situation dans l’écurie des ânes : depuis le 3 janvier, 28 états se sont exprimés (sur 50), presque une moitié doit encore se prononcer. La faible différence entre les deux candidats reste du « jamais vu » à ce stade de la compétition. À tel point qu’Howard Dean ( le Hollande ou Devedjian démocrate) attire l’attention sur les risques qu’une lutte trop longue pourraient entraîner pour les ânes. À trop se battre entre eux (même si pour le moment entre Monsieur O et Lady H c’est plutôt un savant bridge qu’un match de catch), l’avantage pourrait tourner en faveur du vétéran des éléphants. Dean préconise donc le choix d’un unique champion dès le mois d’avril afin de ne pas se rendre à la convention estivale avec un parti divisé.
Faisons un tour à dos d’éléphant : l’avantage est autrement plus sérieux pour le général McCain. 689 délégués sont dans sa poche contre 156 pour le pasteur chantant et 133 pour Coco-la-Mitt. Mais attention, un des deux challengers vient de se retirer. Mitt Romney après avoir dépensé 87 millions de dollars sur les 90 qu’il avait investis dans sa campagne juge son retour sur investissement trop faible et décide de raccrocher les gants. Malgré tout, chacun des trois candidats parle à son public « niche » : les conservateurs sudistes pour Huckabee (il a regrossi non ? ça doit être tous ces épis de maïs lors des meetings…), et les conservateurs Yankee pour Mr Mormon. McCain pour avancer doit fédérer un parti encore désuni et donc se rallier ses marges les plus extrêmes. Son discours indépendantiste ne fera pas long feu. Il y a fort à penser que sa dernière proposition de légalisation des clandestins, par exemple, ne tiendra pas face à cet électorat. McCain a fort à gagner à unifier tout de suite le parti afin de prendre de vitesse les démocrates qui ne parviendront pas à un accord immédiat. Le retrait de Mitt est déjà une bonne étape. Les Américains (mais tous les électeurs non ?) aiment les équipes soudées et les combats nets, ils verront toujours d’un meilleur œil les candidats en bon ordre de bataille. Le retrait de Coco-la-Mitt peut être aussi un signe à ne pas négliger : sa spécialité (consultant et analyste) pourrait en effet laisser penser qu’il sent venir la victoire démocrate, assez logique après 4 années de Busherie ?

Cette élection – je rappelle qu’elle commence à peine- est déjà la plus chère de toute l’histoire électorale US, elle se dessine aussi comme la plus longue, la plus âpre entre les candidats. Qui saura tenir cette distance ? Gageons que le Kenyan est taillé pour gagner les courses de fond… En tous les cas, il s’avère extrêmement doué pour lever des fonds (ce qui est en soi un signe de compétence pour les Américains) : plus de 27 millions de $ en janvier et 3 millions pour le seul lendemain du Super Tuesday. Madame H tient la rampe, mais elle a été obligée d’envoyer un signe en investissant 5 millions de $ de sa poche pour crédibiliser sa candidature et son Fund raising. Certains membres de son staff ont aussi refusé de prendre un salaire sur le mois de janvier, ce qui montre que l’argent est précieux (parce que plus rare ?) dans l’équipe de la dame. Cette cassette est principalement destinée aux frais de campagne mais surtout à de l’achat d’espace publicitaire à la télévision. N’oublions pas que le territoire est vaste, avec plusieurs fuseaux horaires, et qu’il faut en passer par là pour tenter de toucher les électeurs de façon homogène et simultanée.

Le calendrier va maintenant se relâcher un peu. Le temps pour nos candidats de se refaire une beauté. Mais, pour les démocrates dès ce week-end, la Louisiane s’exprime, ainsi que le Maine, le Nebraska et l’état de Washington. Ce sont quatre états favorables à Obama. A surveiller également le 12 le vote du Maryland, de la Virginie et du Wisconsin, le 19. Madame H compte sur peu de victoires en février et sa position de leader toute relative pourrait bien être remise en cause. Pour se consoler elle se concentre sur le Texas et l’Ohio début mars car 400 délégués environ sont en jeu pour ces deux seuls états.

Le spectacle continue.

See ya !

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