Rangement de printemps

Publié le 18 mai 2011 par Paumadou

Couverte de poussière, en sueur d'avoir remué tout ça dans la chambre qui autrefois fut celle de mon frère, qui désormais fini de réchauffer sous le toit brûlant tous les livres dont mes parents ne veulent pas se séparer, je suis assise à même le sol devant le tas de paperasse exhibé de sous le lit.

Tout ça c'était très bien là, pourquoi se force-t-on a remuer les souvenirs qui dorment sous la poussière du temps ? Parce que j'ai bientôt trente printemps, parce qu'il serait temps que je vide la maison où j'ai grandi des vestiges de mon enfance. Parce que ce n'est plus chez moi. Oh, bien sûr, ça peut rester là, mais il faut faire un tri... Et c'est le plus pénible : trier ce qu'on veut garder, ce dont on ne peut pas se séparer...

Et tomber sur ce qu'on voudrait ne jamais avoir perdu. Des lettres. Tes lettres. Je n'en ai lu que des bribes.

Salut Pauline, c'est moi, ton écrivain préféré.

Mince,  j'avais gardé ça comme une pure lubie de ma part. Une amitié, oui, mais pas aussi intense que mes souvenirs me laissaient croire. Un truc que j'aurai fabulé pour supporter le fait que tu n'étais plus là. D'autres mots, d'autres gens. Disparus, partis. Et me voilà, le cul par terre, la peau qui tire, les yeux qui démangent d'avoir agité le passé. Je me sens sale, je me sens triste. C'est une belle journée pourtant. J'ai ri, j'ai soupiré, j'ai jeté au feu des pensées qui n'évoquaient plus rien du tout pour moi. Mais j'ai besoin de me remettre les idées en place, de décrasser cette couche de suie qui me couvre comme autrefois les pleureuses antiques s'enduisaient en signe de deuil.

Tout ça aurait dû rester sous le lit du second, bien enfoui sous la poussière et ne jamais en ressortir. Finalement, je n'ai pas pu jeter tes lettres. Même si elles sont là, dans leur boîte dans un coin du salon, à me pourrir la vie depuis plusieurs jours. C'est idiot, quand j'ai cru que ma mère avait mis la boîte à la poubelle, j'ai eu l'impression d'étouffer. Pourtant, ça n'aurait rien changé : je ne les ais pas relues, je n'y arrive pas. J'ai peur d'y découvrir des aspects de mon passé qui ne ferait que me torturer d'avantage. Après tout, ça me convenait bien ce dont je me souvenais. Juste ça, ça aurait pu me porter jusqu'à la fin de ma vie.

Sauf qu'il y a ces lettres qui se rappellent ce que j'avais oublié.