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Mise en boîte

Publié le 01 juin 2011 par Ctrltab

Mise en boîte

Il me regarde, je m’ennuie. Nous sommes plus d’une vingtaine à la table. En arrière-fond sonore, musique à fond ! Elle nous empêche toute conversation, tant mieux nous n’en avons aucune. La nuit noire et zébrée par la lumière artificielle nous enveloppe. Nous nous  contentons de mimer les bruits des conversations. Nous trinquons nos verres et nos rires, il en ressort le même son cristallin et grinçant. Je bois. Que de l’eau. Des litres et des litres. De Miami à Paris, j’ai vu tous les bars ivres et ma chair est lasse. Je m’en fous, j’irai me faire vomir tout à l’heure. Coup de coude assassin dans mes côtes, Delphine me rabroue :

- Tu t’éteins ! Fais un effort. On dirait que tu assistes à un enterrement.

- C’est bien l’impression que j’ai.

- Sors un peu de tes idées noires. S’il te plait ! Qui ne rêverait pas d’être à ta place ?

Je jette un coup d’œil à mes congénères. Je vois des seins qui se trémoussent, des peaux tirées par le soleil d’Ibiza, des mains qui arrachent couverts et baisers, des cheveux qui fouettent leurs voisins, des nez qui ne savent plus quoi sniffer. Tout est fake ici…

- Personne.

- Souris au moins. Me fous pas la chouma !

J’esquisse une grimace.

- C’est bien la dernière fois que je t’invite.

La tête me tourne. Je cherche un appui. Ma robe me colle. Elle est trop courte. Mes fesses pointues reposent presque nues sur la banquette en skaï.

- En plus, t’as une touche, ma vieille. On dirait que tu fais péter les boutons de la braguette du bout de table… Pas mal, joli coup de filet.

Je tourne la tête vers mon papillon. Je sais bien qu’il me regarde. Depuis le début de ce pseudo dîner, ses yeux ne m’ont pas quittée. Je pourrais être flattée. Les deux bimbos collées à ses basques apparemment ne lui suffisent pas. Il préfère les filles aussi plates qu’un garçon. Il m’emmerde à me regarder ainsi. Je n’en ai que faire de son désir.

- Tu parles du fossile là-bas ? Berk, quelle horreur ! Il est tiré de tous côtés. Il n’y a plus que ses yeux d’encore mobiles. Un vrai mollusque, oui…

- Attends, tu sais de qui tu parles ?

- Tu peux te toucher, je n’aime pas les vieux lubriques. Coucher avec une star, moi, ça ne m’a jamais fait mouiller.

- Mais c’est Johny !

- Excuse-moi, je crois que je vais aller vomir…


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